Quelques mois seulement après la parution du décevant Skin, Peter Hammill revient avec un album d'une toute autre teneur et, disons-le tout de suite, d'une bien plus grande qualité.
And Close As This est une performance quasi "live" où l'on retrouve Peter Hammill seul derrière ses claviers. En effet, les huit titres que compte l'album ont été enregistrés en une seule prise, auxquelles ont ensuite été mixées quelques parties pré-enregistrées permettant de renforcer les effets, apportant une touche de variété à l'ensemble.
D'aucuns pourraient craindre une certaine monotonie devant un tel exercice. Bien au contraire, And Close As This est un album d'une grande diversité, sachant alterner douceur et violence, intimisme et symphonisme. Evidemment, il s'agit une fois de plus d'une approche originale et dérangeante de la musique. Tous ceux qui connaissent l'univers de Peter Hammill n'en seront pas surpris, et ceux qui l'apprécient ne pourront que s'en réjouir.
Car ce disque ne connaît aucun moment faible. Les titres oscillent entre le très bon et l'excellent, qu'il s'agisse de la qualité des compositions ou de celle de l'interprétation.
Côté composition, l'émotion dégagée par de très passionnées déclarations d'amour se confronte aux parties plus chaotiques et vigoureuses de chansons sur le pouvoir de l'argent et les rapports humains. A noter la participation de Keith Emerson dans la composition d'Empire Of Delight, mais inutile d'y rechercher une quelconque réminiscence d'ELP.
Côté interprétation, Peter Hammill joue sur toute la palette de l'instrument qui a toujours fait sa force, son originalité et son charme : sa voix. C'est une constante sur toute sa carrière : PH dispose d'un magnifique organe, mais c'est surtout la façon dont il s'en sert qui fait de lui un chanteur hors norme. Si sur ses dernières productions, il manquait sensiblement de dynamisme voire d'implication, semblant tenter de livrer des prestations plus consensuelles, il revient en grande forme dans And Close As This. Tour à tour émouvant, ironique, agressif, désespéré, inquiétant et même rassurant (Sleep Now), Peter Hammill délivre des titres habités et sincères. Certes, son style très particulier ne laisse pas indifférent : on aime ou on n'aime pas. Mais l'investissement de l'artiste dans son œuvre est évident et ne peut être nié.
Parmi les titres remarquables, Too Many Of My Yesterdays ouvre brillamment l'album : un magnifique piano/voix gorgé d'émotions drainées par une voix profonde et expressive. Empire Of Delight, majestueux et doux, est tout aussi superbe. La voix part dans les graves pour monter progressivement dans les aigus. Frissons garantis. Plus énergiques, Silver, titre quelque peu déstructuré, à l'ironie sous-jacente, dans lequel le piano s'emballe par moments, et Confidence au chant clairement agressif, parfois renforcé par d'intelligents effets d'écho, viennent secouer l'auditeur par leur acidité. Enfin, moment de rare tendresse, Sleep Now, une berceuse chantée pour sa fille termine en douceur ce très beau disque.
Exercice de style atypique et risqué parfaitement maîtrisé et réussi. Peter Hammill nous prouve qu'il n'est jamais aussi bon que lorsque qu'il se met à nu, sachant alors nous faire partager pleinement ses doutes, ses émois, ses angoisses profondes et ses timides espoirs.