Vous connaissez l’histoire du verre à moitié vide ou à moitié plein ? Voilà ce qu’évoque cet album, l’impression de se trouver devant un récipient contenant autant d’air que de boisson, autant de bon breuvage que de vent.
Débutons donc par le bon breuvage... Un artiste qui exploite à ce point le Stick Chapman (sorte de luth moderne qui se joue avec des baguettes aux doigts) est trop rare dans le monde musical pour ne pas être cité. De plus, Bruno Pitch ne va pas noyer ses compositions sous des tonnes de guitares et autres claviers comme le genre le propose souvent. Seule une rythmique appuyée de percussions diverses vient porter le travail de l’artiste. Dans un style Rock Progressif pas trop prise de tête, riche en poly-rythmies et mélodies majeures, Bruno Pitch peint diverses ambiances orientales, latines, jazzy ou Rock. On pense parfois à du Liquid Tension Experiment sans caféine.
Après vient le vent. Tout d’abord, le batteur, bien que dynamique, est souvent à la ramasse lors des changements de rythme et sur les cassures. Il semble même nager carrément dans le tempo sur "Friendship", un titre pourtant agréable et fourmillant de gratte sèche. Et cela nous gâche un peu l’immersion. Puis il y a, et c’est dommage dans ce contexte pourtant très intéressant, une certaine absence d’originalité. Les tendances musicales abordées ici innovent peu et ont souvent été explorées auparavant par d’autres artistes : pour exemple, "Dual Sphere" et "Karachi" (sans doute le meilleur moment de l’album car réellement original et solide) sonnent très Steve Stevens avec leurs ambiances hispanisantes, claquements de main et darbouka, tandis que "Solarium" possède un côté très Steve Vai avec sa mélodie gentiment naïve. Par contre, l’entêtant et hypnotique "Le Château", s’il débute de façon assez convenue, sait trouver un chemin plus personnel et convaincant sur la seconde partie.
En dehors du dernier titre très expérimental et bruitesque qui ne plaira pas forcement à tout le monde, c’est curieusement la fin de l’album qui convainc le plus. Le batteur semble s’être résigné à jouer les cadors, les mélodies sont pour le coup plus inspirées, plus graves et l’ambiance s’installe vraiment à l’instar d’un "Crystal Garden" ou d’un "Neverlove" pêchu qui rappelle un certain Oldfield.
Cela pourrait se résumer à : Un disque qui ne vaut que pour ceux qui veulent à tout prix du Stick Chapman dans leur CDthèque ! Mais pour conclure sur une note positive, car cet artiste le mérite amplement et que nous préférons le verre à moitié plein, affirmons que le talent de Bruno Pitch est bien présent, la dynamique aussi et qu’avec plus d’audace et surtout de parti pris, le prochain essai pourrait bien nous surprendre...