On risque apparemment de trouver cet album dans les rayonnages de la musique néo-progressive, voire purement progressive, et dans ce registre une certaine mise en garde s’impose. Les mélomanes les plus intransigeants en la matière seraient partisans, sans aucun doute, de placer l’adjectif après la "mise en garde".
En effet, une fois passé au banc d’essai, The Beachcomber a bien du mal à dissimuler ses accointances pop, affichant nombre de paramètres plutôt formatés pour la bande FM : construction générale des morceaux, rythmiques, constance de la dynamique, prédominance de guitares électriques et de basses plutôt conventionnelles. La voix de John Dexter, assez monocorde (sauf sur Down Three Times, ouvrant l’album, et sur No-One Spoke où elle se fait plus épique), entérine largement cette impression.
Down Three Times, puisque l’on parle de lui, embarque pourtant quelques jolies tournures de styles, et au travers de ses tirades de cordes symphoniques (mais synthétiques, au regard du line-up) couplées aux chants des guitares électriques, pourrait se prévaloir d’un genre inédit que nous qualifierons de "Hard FM Folk". Mais la suite n’apporte pas grand-chose de plus, plutôt mi-figue mi-raisin, et cela jusqu’au milieu de l’album environ.
De nouvelles tentatives esthétiques parviennent à faire leur chemin, à compter de No-One Spoke, qui (re)noue avec un style électro/progressif. La prestation vocale y participe également. The Sniper est une sorte de ballade des temps modernes et nous offre une très belle partition de guitares, associant l’électrique et l’acoustique. On Bended Knee n’est pas en reste et démarre à la manière d’une création de Joe Satriani, pour aboutir sur une rêverie mi-atmosphérique, mi-rockeuse, délivrant quelques nappes synthétiques bien dosées (et de bon goût), tout en s’appuyant sur une ligne mélodique bien maîtrisée, sans volonté exacerbée d’accrocher "à tout prix" le feeling de l’auditeur. Un très bon moment, auquel les fans de Barclay James Harvest, par exemple, ne resteront certainement pas insensibles.
La suite va hélas s’égarer dans un registre rock déjà moult fois entendu, de rythmiques insouciantes censées reposer l’oreille, en passant par des considérations qui "balancent" davantage, jusqu’au chapitre des attaques de "grat" effrénées mais sans originalité particulière.
En conclusion, The Beachcomber est à ranger dans les tiroirs du pop/rock (voire rock alternatif), beaucoup plus que dans ceux de la musique progressive. Une fois à sa place, ce projet mérite-t-il qu’on s’y arrête durablement ? En tout cas, il mérite que l'auditeur lui donne une chance : The Beachcomber a suffisamment d’atouts pour être classé parmi les albums "à découvrir". Les exclusifs de la prog’ pure et dure, passez votre chemin. Après tout, on ne peut pas toujours exiger d'un bon rock qu'il soit également doué pour le reste !