Eternel parent pauvre de la chapelle impie, sans doute parce qu’il est dépourvu des caractères tant géographiques que culturels propices à l’émergence du genre, l’Espagne ne peut guère compter que sur une petite poignée de hordes de seconde zone pour exalter les forces des ténèbres. Pourtant, en se nourrissant d'un humus historique, cette modeste scène n’est pas sans personnalité. Xerión le prouve, lui qui s’inspire des mythes et des légendes de sa Galice natale, qu’il honore en recourant à l’Espagnol, pour bricoler son Black Métal mélodique.
Jusqu’à présent surtout actif sur le front du split (sept à ce jour) et de la démo (pas moins de quatre), le groupuscule livre enfin avec Cantares das loitas esquecidas un second méfait bien sympathique. En dépit des lignes très accessibles que sa musique épouse, Xerión sait se draper dans un linceul nocturne incontestable. Son art noir se présente comme le théâtre d’une forêt avalée par une nuit éternelle et que peuplent des esprits et créatures inquiétantes.
Lorsqu’il affiche les traits les plus païens de son identité, le groupe illustre combien la Galice, de part l’héritage celte qu’elle abrite, se révèle plus proche de l’Europe du Nord que de l’Espagne à proprement parler. Ecoutez les premières mesures de la très belle épopée éponyme à la gloire des batailles oubliée, ou la reprise des Viking teutons de Taumusheim, "Loitas na Néboa", et vous comprendrez pourquoi.
C’est donc un Black Métal nappé d’une brume sombre avec beaucoup de claviers dedans, sans que ceux-ci n’oblitèrent les pulsions sanguinaires qui palpitent à l’intérieur de certaines compositions telles que "Pvtrefacta anima Nostra" et son accélération finale. Ceci dit, Xerion serait bien inspiré de ralentir plus souvent le tempo, comme il le fait le temps du très burzumien - et donc très réussi – "Morte na Iauga" dont le riff d’ouverture semble tout droit sorti de Filosofem.
Cantares das loitas esquecidas est donc à prendre pour ce qu’il est : un petit album de Black Métal, agréable à écouter, bien troussé mais vierge de toute véritable originalité, si ce n’est les influences celtiques qu’il lui servent de terreau.