Si "Shout At The Devil" a permis à Mötley Crüe d'exploser sur les sommets du Métal, ce succès a également eu ses contre-parties, synonymes d'excès en tous genres pour les 4 permanentés. Si cette Rock'n'Roll way of life est tout ce qu'il y a de plus sympathique, elle dérape en 1984 en même temps que la voiture d'un Vince Neil imbibé d'alcool, et qui fait un mort en la personne de Razzle Dingley, batteur d'Hanoi Rocks. Après un peu de prison, de travaux d'intérêts généraux, une grosse amende et une cure de désintoxication, le chanteur peroxydé rejoint malgré tout ses camarades, dont le look a viré du cuir noir et clouté à une tenue glam plus colorée, pour l'enregistrement de l'attendu successeur du légendaire album noir au pentagramme.
Si "Theater Of Pain" possède quelques titres forts en son sein, il est malheureusement une véritable déception, offrant le spectacle d'un groupe en manque cruel d'inspiration et se questionnant quant à la direction à suivre. En effet, Mötley Crüe semble hésiter entre le Heavy-Métal et le glam, ne sachant plus vraiment sur quel pied danser et seul le lourd et efficace "Louder Than Hell" se révèle à la hauteur de ce que le quatuor nous avait offert avec "Shout At The Devil". Pourtant, le début d'album reste de qualité malgré ces errements avec un "City Boy Blues" au refrain accrocheur, l'entraînant "Smokin' In The Boys Room", reprise de Brownsville Station, groupe des années 70, et sur lequel Neil dégaine un harmonica rafraîchissant et dynamique, et surtout, le Crüe nous pond un véritable sommet du genre en ce qui concerne le style de la power-ballade avec "Home Sweet Home". Avec son intro au piano interprétée par Tommy Lee, et son solo gorgé de feeling, ce titre entrera dans la légende.
Seulement voilà, ces quelques titres ne suffisent pas à faire un bon album de ce "Theater Of Pain" car pour le reste, nous errons au milieu de titres moyens, certes pas désagréables, mais trahissant un véritable manque d'inspiration, voire une réelle absence de motivation comme le prouve l'interminable fin d'un "Keep Your Eyes On The Money" qu'un sympathique refrain ne suffit pas à sauver. Le voilà d'ailleurs le problème central de cet opus: Mötley Crüe a perdu de vue le fait qu'un bon refrain et un riff accrocheur ne suffisent pas à faire un bon morceau. Dommage car, en dehors d'un "Save Our Souls" indigeste, la plupart des titres sont dotés de ces attributs, mais sans que la mayonnaise ne prenne et que l'ensemble ne décolle, même si nous épargnerons un peu un "Use It Or Lose It" sauvé par sa courte durée et son tempo plus rapide.
Il va donc falloir au plus vite que Mötley Crüe se concentre à nouveau sur sa musique, car drogues et alcool forts, s'ils peuvent exceptionnellement être à l'origine de quelques coups de génie, ont plutôt tendance à entraîner leurs consommateurs vers des gouffres dont ils ont du mal à sortir. Les quatre chiffonniers nous doivent une revanche au plus vite. Ils en ont les qualités, il leur reste à en retrouver la volonté.