En mal d’Alan Parsons Project, éreinté par 10 albums en une douzaine d’année, Eric Woolfson quitte la barque après "Gaudi" en 1987 et s’autorise un repos mérité avant de revenir 3 ans plus tard sur le devant de la scène avec "Freudiana", un concept album sur la vie de Freud (évidemment) qu’il aura la chance de mettre en situation à Vienne la même année (il en résulte un CD rare édité en 1993).
Le line-up de ce disque ressemble à s’y méprendre à celui des derniers APP puisque une grande partie des musiciens sont les mêmes, ainsi que des vocalistes habituels à l’image du célèbre John Miles qui offre à ce disque une intervention magnifique sur la ballade There But The Grace Of God proposant un final de très haut niveau où l’orchestre, conduit par Andrew Powell, croise le feu avec un saxophone en totale liberté (du niveau de Old And Wise de l’album "Eye In The Sky"). Pour ne rien changer non plus au niveau de la technique irréprochable, l’enregistrement et la production en reviennent au fidèle Alan Parsons, un véritable gage de qualité. A noter que l’ensemble des compositions est signé Woolfson hormis l’instrumental Beyond The Pleasure Principle crédité à…Alan Parsons.
Passé ces quelques précisions nécessaires, vous aurez bien compris que cet album concept ne sort pas des sentiers battus par l’APP des années 80, mais il en tire une puissance et une qualité que le Project de cette même période n’a jamais pu réunir sur un seul disque. La moitié des compositions sont des ballades émotionnellement chargées (Dora, Don’t Let The Moment Pass en sont de bons exemples) ou des rythmes mid-tempo à l’image de l’enchaînement inaugural The Nirvana Principle / Freudiana qui renoue à l’identique avec celui du "Eye In The Sky", bigrement efficace et idéale rampe de lancement pour la suite. L’oreille de l’auditeur se penchera aussi sur la doublette Don’t Let The Moment Pass / Upper Me qui montre (s’il le fallait encore) que l’on peut très bien lier deux mélodies imparables coup sur coup avec une ballade chantée par une voix féminine et basculer d’une manière évidente sur un rythme plus soutenu.
Une petite curiosité avec Sects Therapy et sa formule très théâtrale typée cinéma noir et blanc (il est facile de l’imaginer en bande sonore d’un Charlot). Le dernier instrumental offre, quant à lui, un classique Parsonien avec orchestre, instruments électriques puis un final au saxophone, le tout dans une montée en puissance irrésistible.
Ce qu’à réussi à faire Eric Woolfson est la parfaite illustration de l’homme et de son talent inimaginable, et si l’Alan Parsons Project ne l’a jamais atteint, c’est qu’à deux il faut composer en permanence avec le point de vue de l'autre, au risque de laisser filer des perles. Avec "Freudiana" Woolfson a lâché toute sa frustration et, seul aux commandes des compositions, il a su enchaîner une foule de bons titres qui encensent cet album. Un classique du début des années 90. Un disque indispensable à toute bonne CDThèque au dessus du meilleur des Projects (en termes de qualité). RIP Eric Woolfson, ce que vous avez réussi avec ce disque et à l’image de votre immense talent.