Romantic Warriors – A Progressive Music Saga est un documentaire, réalisé par Adele Schmidt et José Zegarra Holder, qui essaye de faire l'état des lieux du rock progressif aujourd'hui, au travers d'interviews de musiciens de la scène progressive, mais également de producteurs, d'organisateurs de concerts et de fans. Le DVD est découpé en cinq chapitres qui, curieusement, ne couvrent pas l'ensemble du DVD, le premier chapitre commençant au-delà des sept premières minutes. Si vous voulez donc voir l'intégralité du reportage, évitez le chapitrage qui, par ailleurs, ne présente qu'un intérêt limité, le titre des chapitres ne correspondant pas forcément à la totalité des reportages qui y sont inclus. Par exemple, le chapitre Gentle Giant commence bien par des extraits d'un concert donné en 1974 (extraits de Features From Octopus et Funny Ways) sur lequel Gary Green intervient pour expliquer à quel point cette période était un âge d'or pour la musique progressive, mais se poursuit rapidement par des extraits musicaux et des témoignages qui n'ont plus aucun rapport avec ce groupe légendaire. Sur les 24 minutes que compte ce chapitre, seules les quatre premières concernent réellement Gentle Giant.
En fait, au fil des interviews, le DVD brosse un portrait du rock progressif autour des différents thèmes abordés : ce qui a amené les musiciens à faire du progressif, la place particulière des Orion Sound Studios, la complexité de cette musique, la relation des groupes et de leur public, leur joie de s'exprimer en concert, l'évolution des techniques musicales utilisées, la création d'instruments hybrides pour trouver de nouvelles sonorités, la place d'Internet dans le business, la difficulté de vivre de leur art, leurs projets d'avenir et surtout la passion qu'ils mettent dans leur musique. Car, s'il fallait ne retenir qu'une chose de ce film, c'est effectivement la ferveur que tous cultivent. Les regards sont lucides : le rock progressif n'est pas à la mode, trop exigeant pour une époque du "vite consommé, vite jeté ", donc la motivation des différents acteurs n'est pas l'appât du gain. Le progressif n'est pas rentable, c'est une affaire de passion, de conviction. Comme le dit très bien Roine Stolt, "c'est un choix de vie", sans concession, et tant pis si l'audience et les "parts de marché" ne suivent pas.
Voilà pour le fond. Sur la forme, si le reportage semble fait par des passionnés pour des passionnés, force est de faire quelques remarques. D'abord, paradoxalement ce DVD contient peu de musique. Le premier vrai extrait musical n'arrive qu'au bout de plus de 15 minutes. Pire, le reportage se termine sur Send A Message From the Heart de Karmakanic, seul titre joué en entier sur tout le film, sur lequel défile le générique de fin. Mais le titre est plus court que le générique, ce qui fait que vous passez la dernière minute trente à lire celui-ci dans un silence absolu ! Quant aux extraits de concert qui émaillent le film, ils sont assez courts et systématiquement recouverts par les commentaires.
D'autre part, le reportage se concentre sur la côte Est des USA et ses grands festivals (ProgDay, RoSFest et NEARFest), et s'intéresse avant tout à quatre groupes peu connus, Cabezas De Cera (Mexique – Avant prog/Fusion), Cheer-Accident (USA – Avant prog/Fusion), Deluge Grander (USA – Prog symphonique) et D.F.A. (Italie - Jazz-rock/Fusion). Outre les groupes précités, on retrouve également Roine Stolt et les Suédois de Karmakanic, les Italiens de La Maschera Di Cera qui nous gratifient de trois superbes minutes de concert, les Américains d'Oblivion Sun, les Japonais de Qui, Rob Martino, joueur de Chapman Stick (instrument à cordes séparé en une partie mélodique et une partie basse) et le sympathique Phideaux.
Enfin, mais ce n'est pas de la faute des réalisateurs, le film laisse une impression douce-amère à la vue de musiciens jouant devant un public clairsemé, plus composé de papis et de quelques rares mamies que de teenagers (les seuls quatre fans de moins de 30 ans apparaissent après plus d'une heure de film), avachis sur leurs fauteuils de camping ou leurs chaises pliantes en frappant mollement dans leurs mains. Spectacle pour le moins déprimant. Ce film est réservé à tous ceux qui, au-delà de la musique, s'intéressent aux motivations des musiciens et au contexte dans lequel évolue leur musique favorite. Plus bavard que musical, il nécessite de plus une bonne connaissance de la langue de Shakespeare, le DVD étant en anglais non sous-titré.