J'ai découvert Madelgaire au mois d'octobre 2005 lors de ma première Convention Prog-Résiste. Le groupe belge ouvrait le festival et son néo-prog de troubadours n'est sans doute pas totalement étranger à cette addiction qui me fait migrer en pays liégeois chaque année pour un week-end automnal de musique, de bière et d'amitié.
Il aura donc fallu cinq ans de patience pour que la musique de Madelgaire entendue en live se retrouve fixée dans une version studio et gravée dans une rondelle de plastique judicieusement nommée (Im)Patience. Le résultat est un album chanté en grande partie en français, construit autour des trois plus anciennes créations qui forment un triptyque sous-titré "Les Banquets d'Équinoxe". Mais avant d'entamer cette pièce maîtresse, en guise d'introduction à l'album, Madelgaire nous livre leur première composition anglaise : "Gimme A Light". Une voix haute pose ses mots anglophones, à peine entachés d'accent 'frenchy', sur une musique généreuse, passant sans faiblir de moments 'acoustico-intimistes' à des développements symphoniques très gouleyants. Le rock néo-progressif de Madelgaire, dans son esprit, nous ramène 25 ou 30 ans en arrière, à cette époque où une poignée de groupes français ambitionnaient de donner à ce genre marginal quelques lettres de noblesse.
La suite (le triptyque sus-cité), composée de "Vae Victis", "Les Murs" et "Dame Brune", ne fait que renforcer ce sentiment d'ancrage dans le passé. Le chant, selon qu'il soit solo ou agrémenté de chœurs, fera penser à Naos ou à Atoll, délivrant des paroles légères et poétiques mais jamais niaises. Sur ces trois compositions, Madelgaire démontre une grande maitrise de la mélodie qui fait mouche, et une grande intelligence dans les sonorités. "Les Murs", par exemple, est typiquement un titre qui mériterait de se hisser au rang de hit aux cotés d'œuvres Marillionnesques ou Angeliques.
Avant de conclure avec des "Regrets" (le deuxième titre en anglais), Madelgaire nous offre un petit moment (2'28) de guitare acoustique enregistré en public. Si ce titre est court, il est pratiquement du même niveau que "Horizons" de Steve Hackett.
On pourrait se poser la question du choix de cette écriture mixte, pourquoi alterner la langue de Voltaire et celle de Shakespeare ? Nos amis Belges sont de bons francophones et "Les Banquets d'Équinoxe" est une bonne illustration des qualités de leur plume, mais, pour autant, ils prouvent avec "Gimme A Light" et "Regrets" qu'ils sont capables de produire d'excellents titres en anglais. Espérons que cette bivalence ouvrira à ce groupe attachant les portes de mondes un peu plus vastes que celui de la petite 'progophonie' franco-belge.
Je conseille à tout amateur de néo-prog parlant à l'âme sans la bousculer violemment, de prêter une oreille attentive à cet album. Les 'plaisirs' qu'il nous offre sont peut-être 'démodés', mais parfois une avancée dans le passé apporte plus de joie qu'un retour vers le futur.