Anvil aura donc perdu trois très longues années avant de proposer son 4ème disque studio, et un tel laps de temps est, dans une époque métallique toujours en mouvement, souvent fatal. Les modes passent vite, le heavy a vu le thrash et le speed métal se pointer et le death métal commence à apparaître quand sort enfin ce "Strenght Of Steel" en 1987. De plus, loin d’être sur un gros label, Anvil a signé chez Metal Blade, certes un label motivé mais loin d’être une grosse écurie qui lui aurait permis de faire rebondir sa carrière. Ainsi du rôle de groupe espoir de la scène, nos amis Canadiens vont passer à celui de combo quasi-ringard et largué musicalement. Il faut dire que le groupe n’a pas changé sa formule d’un iota. Il propose toujours un heavy métal assez speed et mélodique, typique du genre et du début des années 80 mais a perdu la flamme qui l’animait sur ses trois premiers albums.
Car ce quatrième opus est nettement plus faible que ses glorieux grands frères. On sent Anvil un peu perdu, sans ligne directrice forte, naviguant un peu à vue et ne nous proposant aucun titres forts, juste ici et là des chansons honnêtes parmi d’autres forts médiocres. Le bilan de cet album est donc assez léger. Les riffs rapides et inspirés ont bien souvent disparus tandis qu’au chant, Lips force trop souvent pour convaincre. De plus, le son est mauvais, étouffé le plus souvent et handicape largement l'ensemble.
Il ne reste donc que quelques morceaux qui surnagent ici et là, à commencer par le titre éponyme qui ouvre l’album. Il présente un rythme assez lent et épique avec des atmosphères sombres bien trouvées. De plus le refrain est de qualité et bien chanté par Lips. Après, il faut piocher pour trouver des titres corrects. Ainsi, nous garderons l’instrumental "Flight Of The Bumble Beast", rapide et bien exécuté, ou encore "Cut Loose", sans doute l’un des meilleurs titres du disque. Il a un bon riff bien rapide et les harmonies de guitare sont enfin à l’honneur pour le plaisir des fans de duels mélodiques, alors que le chant y est de qualité, rapide mais juste et sans forcer. Enfin, "Straight Between The Eyes" se détache du reste par une mélodie agréable et un bon refrain.
Malgré tout, des titres comme "Concrete Jungle", "9-2-5", "I Dreamed It Was The End Of The World", ou encore "Mad Dog" et "Kiss Of Death", plombent l’ensemble en beauté tant ils sont ratés. Le dernier est même une tentative de heavy mélodique épique mais bien loin de la classe d’un Manilla Road et de ses ambiances. Les autres sont des titres de heavy bien banals et vite oubliés une fois écoutés.
"Strenght Of Steel" est donc un naufrage en grande partie. Anvil n’a pas su se relever de son sommeil forcé et n’arrive à proposer qu’un bien faible album. Le groupe canadien, malgré toute sa sympathie et son envie, rate donc son retour et loupe le coche. On a du mal a croire qu’après ça il pourra retrouver une popularité importante au-delà d’un cercle de fans purs et durs.