Contrairement à ce que beaucoup doivent croire, Y & T n'est pas né avec Earthshaker en 1981. Du moins, pas tout à fait puisque deux premiers albums totalement méconnus et donc oubliés, avaient déjà permis aux Californiens de façonner leur Hard-Rock ensoleillé.
Nous sommes en 1976 : le groupe s'appelle alors Yesterday And Today et vient de voir le jour l'année précédente à San Francisco. Autour de sa figure de proue, le chanteur et guitariste Dave Meniketti, le line-up historique est déjà en place avec Joey Alves (guitare), Phil Kennemore (basse) et Leonard Haze (batterie). Bien qu'il ne puisse pas encore compter sur le puissant fuselage sonore que ses successeurs des années 80 posséderont, le galop d'essai éponyme ne saurait être considéré comme une modeste esquisse des classiques à venir.
Certes, le style si particulier des Américains est encore en gestation, mais il se lit néanmoins très clairement à travers cette poignée de chansons, portées par la voix chaleureuse du capitaine au long court Meniketti, lequel ne manque pas par ailleurs de se fendre de ses soli généreux et gorgés d'un feeling bluesy (l'intro de "Fast Ladies"), qui feront plus tard sa renommée, quand bien même ceux-ci se font encore assez discrets. De même, le son est moins dur que sur Black Tiger par exemple ; il est plus arrondi, tout simplement plus Rock.
Et si une (fine) couche de poussière le recouvre désormais, cela n'empêche pas Y & T de faire montre déjà d'un talent certain tant de composition que d'interprétation. Il suffit de savourer le catchy "25 Hours A Day" aux riffs assez musclés pour l'époque, le superbe "Beautiful Dreamer" ou le heavy "Earthshaker" pour s'en convaincre. A chaque fois, le guitariste libère des éruptions jouissives et volubiles.
En outre, bien avant les "I Believe In You" et autre "Winds Of Change", le beau "My Heart Plays Too" témoigne que le groupe a toujours été très à l'aise avec l'exercice de la ballade, puissante et jamais sirupeuse.
Yesterday And Today révèle déjà toutes les qualités auxquelles le quatuor reste attaché, et à défaut d'être aussi imparable que le sera la légendaire triplette Earthshaker/Black Tiger/Meanstreak, demeure un premier jet particulièrement convaincant, dont quelques titres un peu plus faibles ("Alcohol"...) ne suffisent pas à tempérer l'évident potentiel de ses auteurs. A l'instar du cependant moins réussi Struck Down, seconde offrande de 1978 et la dernière à avoir été publiée sous le patronyme d'origine, cet album mérite bien une (re)découverte...