La rédaction d’une chronique réserve parfois de grands moments de solitude. En effet, vous avez beau écouter et réécouter un album, tout reste lisse à votre oreille et aucune accroche ne s’offre à vous pour attaquer la critique de la musique qui vous est proposée. Impossible d’encenser l’objet, et rien qui ne justifie de le critiquer vertement.
C’est le cas une nouvelle fois avec ce "Back On Track", huitième opus studio des Bernois de Shakra. Pourtant, il y aurait de quoi dire sur les évènements qui ont rythmé la vie du quintet helvète depuis son précédent album. En effet, Mark Fox a quitté le navire peu de temps après la sortie de "Everest" et il a donc fallu organiser des auditions pour le remplacer. Au milieu d’une centaine de prétendants, c’est le chanteur John Prakesh, originaire d’Inde, qui a emporté le morceau grâce à une voix puissante n’étant pas sans rappeler celle du défunt Steve Lee (Gotthard).
Et c’est là que les choses se gâtent car Shakra n’a jamais réellement réussi à sortir de l’ombre du géant récemment endeuillé par le tragique décès de son charismatique chanteur. En dehors d’un "Fall" aux errements grunges, chaque album de Muster & Cie renvoie systématiquement à Gotthard et ce n’est malheureusement pas ce "Back On Track" qui va changer la donne. Tout est parfaitement exécuté, il y a de la puissance ("B True B You"), des refrains et des riffs accrocheurs ("Crazy", "Back On Track"), de belles ballades qui ne sombrent pas dans le larmoyant ("When I See You", "Lonesomeness") et même un côté à la fois heavy et mélancolique loin d’être désagréable ("Yesterday’s Gone"), mais pour l’originalité et la personnalité, vous pourrez repasser.
Dommage car l’ensemble est parfaitement produit et interprété et John Prakesh soutient parfaitement la comparaison avec ses prédécesseurs à ce poste. Il y a donc largement assez de qualités pour espérer autre chose qu’un clonage, aussi bon soit-il. Alors certains pourront toujours arguer que Gotthard ne reviendra probablement pas de sitôt sur le devant de la scène et que nous serons alors bien heureux de trouver Shakra pour combler le vide laissé par l’irremplaçable Steve Lee et sa bande. Ils ont sûrement raison, mais pour l’instant, le drame est encore trop proche et douloureux pour que nous puissions nous consoler avec ce "Back On Track" alors que "Domino Effect" est encore juste à côté de notre platine.