Après une discographie désormais bien lancée avec deux derniers albums conceptuels ("Power and the Passion" et "Dawn"), et régénéré par un changement presque complet de personnel lors de la réalisation de "Dawn", Eloy va réaliser en cette année 1977 ce qui reste à ce jour non seulement sa plus grosse vente mais également son plus beau succès artistique.
Pour situer rapidement le succès de ce "Ocean", deux anecdotes sont à relever : 'Poseidon's Creation' est devenu le générique de Tatort, une de plus célèbres séries télévisées outre-Rhin. Enfin, 15 ans après sa sortie, cet album a reçu un gold-award de la part d'Emi, récompensant ses 250 000 exemplaires vendus rien qu'en Allemagne. Bien entendu, ceci n'est pas forcément gage de qualité, mais le contenu de cet opus va venir prouver que succès commercial et qualité artistique dans le progressif peuvent aller de pair.
Quel plus beau mythe que celui de l'Atlantide, Eloy pouvait il associer à sa musique cosmico progressive ? Adepte de science fiction, de textes ésotériques et de musique planante, le groupe ne pouvait évidemment pas passer à côté de cet "hommage". Premier élément, la magnifique peinture de Wojtek Siudmak qui orne la pochette de l'album plante immédiatement un décor qui appelle à l'évasion..
Côté musique, 'Poseidon's Creation' plonge l'auditeur dans un monde fantasmagorique : la batterie et les percussions infernales de Jürgen Rosenthal, soutenues par la basse ronflante de Peter Matziol viennent soutenir une kyrielle de synthés, Mellotron et autres Hammond, tandis que la guitare de Frank Bornemann vient lancer ses éclairs acérés. Les thèmes instrumentaux se répètent, s'entremêlent, proposant de multiples rebondissements, alors que les parties chantées, s'apparentant plutôt à de la narration, viennent se poser sur des passages les plus calmes. Incontestablement, la nouvelle section rythmique du groupe mène la danse, et nous entraîne dans une folle sarabande.
Les trois autres plages de l'album, quoique présentant une atmosphère globalement plus calme, vont prolonger l'ambiance futuriste si bien plantée, et fournir un terreau plus que fertile pour de futures interprétations live que nous retrouverons d'ailleurs avec bonheur sur l'album du même nom.
Avec "Ocean", le style Eloy se trouve ici à son apogée, combinaison réussie de sonorités planantes, d'utilisation judicieuse des synthés, avec un côté limite Hard Rock proposé par les deux maniaques de la rythmique, combinaison d'un batteur dont le jeu recèle de multiples fioritures et d'un bassiste dont la comparaison avec le grand Chris Squire n'est pas usurpée.
En dehors d'une production désuète que le remaster atténue légèrement, il n'y a vraiment rien à jeter dans ce grand album, porte d'entrée idéale pour qui voudrait s'initier au style Eloy et référence incontournable pour les fans du groupe.