On sentait bien qu’avec Hävitetty uniquement composé de deux longues épopées pour près d’une heure de musique, Moonsorrow était en quelque sorte arrivé au bout de quelque chose. Aller au-delà se révélait (presque) impossible. Avec l'EP Tulimyrsky, dont seule la reprise du "For Whom The Bell Tolls" de qui vous savez en justifiait l’achat, les Finlandais ont confirmé qu’ils avaient clairement atteint leur limite, la composition fleuve donnant son nom à la galette s’étirant inutilement durant une demie-heure. Eux-même l’ont-ils ressenti ?
Outre le fait qu’un temps inhabituellement long sépare Varjoina Kuljemme Kuolleiden Maasa de Hävitetty (quatre ans), ce nouvel opus renoue avec une fome de Black Metal moins contemplative et basée sur une architecture certes toujours épique mais (un peu) plus ramassée. En effet, à une exception près, les pistes ne dépassent pas le quart d’heure ce qui est toujours beaucoup mais pour Moonsorrow finalement assez peu.
Ainsi cette sixième offrande se présente sous une allure plus traditionnelle, proche en cela de Verisäkeet, en moins âpre toutefois. Quatre expéditions, balisées par trois courts intermèdes instrumentaux, en constituent la moelle épinière. Sans surprise, Moonsorrow reste fidèle à sa majestueuse identité qui sent bon les fjords et les forêts éternelles.
Malgré des claviers heureusement parcimonieux qui témoignent néanmoins que les Vikings appartiennent bien à la famille Finntroll, la musique conserve toujours une certaine noblesse cependant que les cousins Sorvali, idéalement appuyés par le mercenaire des fûts Marko Tarvonen (October Falls, Thy Serpent...), n’oublient jamais quelle chapelle ils exaltent. Bref, Varjoina… s’enfonce dans la steppe d’un Black Metal d’obédience païenne et grandiose nourri au grand et défunt Bathory époque Hammerheart et Twilight Of The Gods (la meilleure donc).
"Tähdetön", "Muinaiset", "Huuto" et "Kuolleiden Maa" sont de véritables pièces d’orfèvrerie (surtout la dernière d’entre-elles) qui n’offrent leur précieuse intimité qu’après de multiples préliminaires. Bien qu’accessibles en dépit de leur durée que d’aucuns jugeront certainement excessive, il faut du temps pour les apprivoiser et goûter tous leurs trésors enfouis dans leurs replis gelés. Elles galopent à travers de vastes étendues mythologiques souvent vertigineuses toujours glacées, corsetées par la neige et battues par le souffle du Grand Nord.
Moonsorrow livre donc ce qu’il sait faire de mieux, sans prises de risque hormis de légères touches plus progressives durant le titre d'ouverture. Les Finlandais sont les seuls chez eux à parvenir à honorer le vrai paganisme sans sombrer dans le ridicule, bien que celui-ci ne soit parfois évité que d’extrême justesse. L’essentiel est préservé et Moonsorrow reste le Viking triomphant que l'on aime, quand bien même on préférait lorsqu’il braquait son regard vers la Norvège la plus noire comme il l’avait fait avec Verisäkeet.