Après le trés réussi "Power And The Passion" il était dit que le groupe soudé autour de son leader allait enchaîner une nouvelle bombe progressive et talentueuse avec le même line-up… Eh bien non ! En fait, le mal couvait et même si les intervenants talentueux savaient créer de sublimes concepts, les personnalités n’ont pas réussi à fusionner au-delà des (é)preuves musicales.
Pourtant, Franck Bornemann arrive tout de même à remonter la pente et un groupe en peu de temps avec notamment un bassiste percutant, soyeux et qui allait devenir, à son poste, la référence du son Eloy (d’ailleurs la dernière mouture en date lui doit bien une partie de l’intérêt qu’il est possible de lui porter). Klaus-Peter Matziol (puisque c’est lui dont il s’agit) fait ronronner sa basse, la triture, la cajole pour donner à ce nouveau concept une douce réplique à l’orchestre symphonique qui ponctue l’ensemble des titres. Si ce "Dawn" est une réussite c’est bien en partie grâce à lui et à l’enchaînement des folles idées qui font de cet album une référence dans la discographie du groupe allemand.
En effet, il était difficile en si peu de temps de prétendre sortir un concept aussi osé et aventureux que le précédent, et pourtant Eloy réussit la passe de deux haut la main. Mixer symphonisme et séquences enlevées (solis de guitare, loop vertigineux et répétition de séquences obnubilentes) n’est en fait que la résultante d’un état des lieux assez chaotique car Detlev Schmidtchen, qui vient de se mettre aux claviers après une formation de guitariste, méritait d’être secondé. Et c’est sur un orchestre traditionnel que s’est porté le choix de Bornemann.
Oscillant en permanence entre moments de tension (impulsés par les cordes) et de détentes bienvenues, le groupe impose une rigoureuse ligne de défense difficilement pénétrable. L’enchaînement "Lost Introduction/The Decision" est symptomatique de l’ambiance générale : orchestre puis basse se relaient pour mettre sur orbite des nappes simplistes de claviers portant la voix de Franck (qui d’ailleurs s’est encore amélioré au niveau de l’expression).
Si les solos de guitares sont assez épars et ne sont pas l’attraction de l’opus, le space-prog d’Eloy approche de son apogée et seul "Ocean" pourra détrôner, de peu, ce disque indispensable, référence dans toute bonne discothèque du proggueux de base. Encore aujourd’hui "Dawn" est la preuve du formidable élan que le leader n’a cessé d’apporter à son groupe. 1976 : l’année où la bascule entre connaissance et reconnaissance a eu lieu...