Oubliés, les débuts électro-pop. Des vocalises rampantes et caverneuses rappelant les méthodes de la première période musicale de Midnight Oil, une basse inlassablement ronronnante, de bons gros riffs de guitares punk, les phrasés austères d’un Lou Reed ou d’un David Bowie, le fidèle suivisme d’une infatigable rythmique, voilà qui caractérise en quelques mots la nouvelle verve stylistique de nos amis bretons domiciliés du côté de Lorient.
Hé oui, Kina Temple, reprenant le patronyme de son vocal féminin au timbre androgyne, est bel et bien une formation compatriote, et le constat mérite d’être mentionné. Du Rock anglo-saxon à la française (ou l’inverse ?), ce n’est pas si fréquent, et en ce sens la prestation de "Flesh" est plutôt convaincante, y compris d’un point de vue linguistique : "Exit, la langue de Molière", pourrait-on dire pour rester dans le ton.
Mais au-delà de cette performance outre-manche, il faut souligner que l’approche artistique n’est pas des plus ludiques. Certains auditeurs seront sensibles au caractère exclusif de la sonorité et de la composition, alors que d’autres y verront un excès de zèle. Et on ne peut pas tout à fait donner tort aux partisans de la seconde théorie, car une fois passées la cavale emblématique de l’ouverture éponyme et les transes prophétiques du vibrant "Spark Of Life" aux élans new-wave façon The Cure, on peut avoir le sentiment que l’inspiration tourne en boucle. Seul "On The Shore", en fin de programme, permet de renouveler la teinte émotionnelle, affichant de belles velléités atmosphériques, et toujours en respectant la cohérence de l’enveloppe sonore. Cette dernière se montre en effet très homogène sur l’ensemble du projet, en dépit de la texture du dispensable "Help Me" dont l’enregistrement semble avoir été écrêté.
Bilan ? Malgré un certain piétinement, "Flesh" dégage une grosse énergie d’irréductible rocker, augurant de lendemains prometteurs. Attention donc aux corsaires intrépides de Kina Temple qui tels des Surcouf en puissance, entendent bien voguer sur des océans où les escadres britanniques tentent d'imposer leur domination.