Ceux parmi vous qui, se rappelant peut-être la douceur de Nastassja Kinski dans le film de Roman Polanski du même nom, auraient été attiré par Tess pensant y trouver un quelconque groupe de metal atmosphérique à chanteuse, en seront pour leur frais. Nous en sommes très, très loin. De toute façon, le fait que le collectif puisse compter sur le soutien du jeune label M&O Music auraient dû les alerter, ce dernier n’ayant pas pour ligne de conduite de signer des formations pour midinettes.
Au confluent du Post-Hardcore et de la mouvance screamo, Tess propose un second crachat énervé et épidermique, boule de nerf intense directement connectée à une réalité urbaine sombre et profondément désespérée. Si le chant tour à tour plaintif ou écorché, pourra (devrait) en rebuter certains, le groupe, dynamo vivante à fleur de peau, forge cependant une musique souvent intéressante, sous tension permanente qui bouillonne d’idées et de noirceur.
Pénible à écouter sur la durée, Les autres se veut la peinture désenchantée d’un monde à l’agonie dont le pinceau épouse la forme de textes inspirés. On suit cette plongée, un peu secouée par tant de violence tant musicale que verbale, on s’accroche à la maigre et furtive beauté qui suinte du pourtant triste "Ruine", que tapissent quelques lignes de violons salvatrices bien qu’elles participent d’un sentiment tragique et délétère et on finit l’immersion dans cet album sur les rotules, exsangue.
Tess gagnerait à privilégier ses traits Post-Hardcore - "Le nombre d’or" le prouve - et à canaliser les vocaux de son chanteur par trop hystériques, quand bien même ce côté screamo est tout à fait revendiqué et assumé. De fait, si les amateurs du genre trouveront dans cet opus certainement matière à cultiver leur mal-être, les autres, dont nous faisons partie, seront plus partagés face à un album très bien charpenté, à la prise de son explosive et nerveuse, mais usant à écouter. Des qualités, une maîtrise et une sincérité incontestables au demeurant.