Faire une chronique d’un album de Killers sans pondre un petit couplet sur la longévité, la ténacité et la dévotion de ce groupe hors normes dans le paysage Heavy français est une gageure. Ce d’autant plus quand, après plus de 20 années d’indéfectible activisme métallique, les basques nous pondent un 12ème album qui ne comprend pas moins de 22 titres. Loin de donner des signes d’essoufflement, la bande à Bruno Dolheguy nous dépose là un vibrant pavé de Speed Metal qui n’est pas sans rappeler les styles de Running Wild ou de Kreator. Le terme « pavé » ne doit cependant pas effrayer puisqu'il serait plus judicieux de faire ici référence à un mille feuilles.
En effet, certainement soucieux de ne pas se montrer trop indigeste via un style qui peut parfois l’être par nature, le groupe a su habilement varier son propos de manière à concilier au mieux son agressivité intrinsèque et les variations de ses vecteurs d’expression. Ainsi, au détour de ce "A L’ombre Des Vautours", on bénéficie de 3 « intermèdes » musicaux ("L'Enfer Du Décor", "Nouveau Monde" inspiré de la Symphonie N° 9 en Mi mineur d’Antonín Dvorák, et "Trajectoire"), et de 2 reprises réinterprétées en français que sont le "Black Wind, Fire And Steel" de Manowar raccourci et rebaptisé "Habemus Metal" et enfin le "Overkill(ers)" de Motörhead agrémenté de quelques notes de "La Marseillaise". Quelques petits divertissements sont aussi au menu telle l’introduction de "La Ronde Des Couillons" qui reprend quelques notes du révolutionnaire "Ah ! Ca Ira".
Pour autant, nous n’avons pas là droit à un patchwork décousu mais bien à un album de pur Speed Métal direct et efficace, agrémenté de petites bulles de fraicheur qui ont pour vocation d’éviter une certaine lassitude inhérente au genre. L’inspiration est clairement au rendez-vous, que l’on se réfère aux très sauvages "Deux Bastos Dans Le Cigare" ou "No Future", au plus surprenant "Comprendre", qui s’achève sur un texte de Baudelaire tiré des "Fleurs Du Mal" et déclamé sur fond de chœurs, ou encore à des titres aux cadences plus « légères », à l’image de "Faire Du Métal".
La rythmique abat un travail énorme en terme de puissance, voire même de subtilité permettant par la même de donner à des titres du type d’"Absence" une ambiance plus ténébreuse. Les textes sont toujours aussi forts, Bruno Dolheguy prouvant une fois de plus qu’il est un écrivain hors pair lorsqu’il s’agit de croquer avec justesse et cynisme les travers de notre société et les difficiles choix auxquels nous sommes parfois confrontés. Certes, la répétition des déclarations de dévouement à la cause métal perdent-ils un peu en impact en flirtant un peu trop avec les poncifs du « True Métal », une facilité guère digne du talent du bonhomme. Pourtant il faut bien avouer que l’on prend bien souvent un plaisir fautif à l’écoute de ces hymnes à la gloire du métal.
Fidèle au poste, Killers nous offre là une nouvelle série de titres belliqueux et efficaces qui ne pourront que ravir les adeptes de Metal rapide, puissant et sincère. Encore bravo.