Formé en 2003 pour accoucher d’un premier album huit ans plus tard, l’histoire de Thence à tout l’air d’un parcours du combattant, du script mainte fois observé dans la réalité relatant la lutte contre labels et distributeurs. Pourtant la raison est plus à chercher du côté de plannings trop chargés ; Juha Sirkkiä, son fondateur, rejoint en 2009 par Erno Räsänen devant jongler simultanément avec projets parallèles et vie de famille.
Assis au pied d’un monde qu’il leur faut construire, ce princeps de presque une heure se trace comme une longue route de leur Finlande natale, sans halte. Un seul morceaux comme le décor d’une nuit de pleine lune, une peinture constellée d’ombre et de voiles éthérés. Au mieux pourrait-on segmenter l’ensemble en quelques grands mouvements, mais pour des raisons de cohésion, le duo aura préféré cimenter en un unique bloc chacune des pierres de cet imposant édifice.
Attaché aux ambiances en clair-obscur, comme les ont déjà dessiné leurs homologues de Katatonia ou d’Anathema, Thence reproduit cette chorégraphie des sons créant lumière et pénombre, sérénité et amertume.
Quoique semblant intemporel, le recueil des Finlandais ne bénéficie pas moins d’une production d’une pureté que seuls des moyens actuels peuvent engendrer. Une modernité que de nombreux effets ou nappes électroniques viennent d’ailleurs renforcer en diverses circonstances de l’intrigue.
Mais aussi, après un cheminement où se sera installé lentement la trame de ce captivant scénario, un saxophone majestueux, désormais très présent, vient rajouter une épaisseur veloutée, presque jazz, comme Pink Floyd savait les travailler. Ces vagues aériennes s’entremêlent avec le plus dur ressac électrique que parfois des guitares à la Dawn Of Solace arrivent à imposer.
Malgré un format qui oblige une écoute longue et studieuse, le voyage des Scandinaves sur leurs terres embruinées possède suffisamment de matière noble pour captiver d’un bout à l’autre. Déjà mature, l’œuvre de Thence devrait bénéficier à terme, si les attentes se confirment avec un deuxième opus, d’une reconnaissance équivalente à celle de ses pairs.