Que les Acteurs de l'Ombre, activiste bien connu de la scène underground parisienne ayant débuté la production avec les premières expériences de Pensées Nocturnes, ait récemment signé le tordu Cult Of Erinyes ne surprend pas. Par contre qu'il ait décidé de distribuer l'album éponyme de Numen, modeste horde venue d'Espagne, est plus étonnant. Pourquoi cela ? Pour deux raisons au moins.
D'une part, bien qu'il soit norvégien de coeur, ce qui est toujours un gage de qualité, le groupe fait montre d'une belle orthodoxie dans sa manière d'exalter le Black Metal. En cela, de part son approche du genre, il parait bien loin des prétentions tant artistiques que thématiques que le jeune label semble vouloir cultiver. D'autre part, cet album, le troisième de ses géniteurs, n'a rien d'une nouveauté puisqu'il est sorti à l'origine en 2007 via l'obscur Goimusic. Quatre ans plus tard, Les Acteurs de l'Ombre lui offre donc une seconde peau ainsi qu'un nouveau visage.
Et sans être une pièce essentielle, nous pouvons finalement remercier les Français de nous permettre de découvrir ce groupe dont Numen demeure à ce jour le dernier signe de vie. Agglomérant six titres crépusculaires, celui-ci est le théâtre glacial d'un Metal noir d'obédience scandinave que teintent des influences folkloriques, le tout emballé avec le charme de l'artisanat propre à pas mal de groupuscules espagnols.
C'est donc roots de chez roots, cru, froid et souvent sauvage, comme le montre "Belearen Hegaldiak... Iluntasuna Dakar". De la série B certes, mais Numen arpente avec une évidente honnêteté les terres du vrai pagan Black Metal, celui qui n'a pas besoin de sandales et de bombardes pour invoquer les légendes et les récits de jadis et peindre une nature sombre et mystique qui n'en est que plus belle. En résumé, les Basques nouent davantage de proximité avec Kampfar ou Nydvind qu'avec Finntroll ! Et c'est tant mieux.
De toute façon largement supérieur à ce que peut commettre le claviériste du groupe avec son projet solo, Elffor, sorte de Summoning du pauvre, Numen est un de ces petits albums tout à fait agréables à écouter car détenteur du charme de l'authentique et qui, sans être indispensable, ravive avec ses modestes moyens le brasier du Black Metal à la norvégienne du début des années 90. Espérons que cette résurrection soit annonciatrice d'un retour prochain avec une véritable nouvelle offrande...