Voilà presque quatre ans, est arrivé sur la carte de Music Waves un plat inattendu : au menu, pastèque givrée ! Les cuistots du moment (le groupe Court pour leur album “The Frost of The Watermelon”) étaient de piètres artisans, plutôt du genre “taupe-chef” que trois étoiles ; et voici qu’en ce printemps 2011 se présente un nouvel arrivage. Au menu du jour, comment accommoder le porc au gingembre ... le groupe Gingerpig nous a en effet concocté ce “Ways of the Gingerpig” dont le critique, ici musical plus que gastronomique, souhaite qu’il soit plus appétissant que la livraison évoquée.
Aux commandes de l’équipe, Boudewijn Bonebakker, guitariste de Gorefest, un groupe qui évolue entre le hard rock et différentes sensibilités extrêmes (death, heavy metal). Lassé de servir les mêmes plats, Boudewijn décide de changer la carte et d’explorer les contrées goûtues du progressif, en se basant sur l’utilisation de l'orgue Hammond. Retour donc aux années 70, avec des arômes vintage et des méthodes analogiques : seules les voix ont été enregistrées à part, le reste dans les conditions du live. Le goûteur - pardon, l’auditeur - se dit : “Encore les 70’s !”, tant il est vrai que le retour aux sources est une recette galvaudée ...
Et puis après quelques minutes d’écoute, de dégustation devrais-je écrire, il faut se rendre à l’évidence : les marmitons ont ici un savoir-faire certain, et l’expérience du chef amène à un résultat bien abouti. La production est effectivement teintée de saveurs 70’s, avec un Hammond en vedette et des arômes de The Doors ('March of the Gingerpig') ou Deep Purple ('Undefined Call'), qui ne seront pas pour déplaire aux nostalgiques. Le tout est servi dans une présentation plutôt dynamique où le rock n’est jamais bien loin, le plus bel exemple étant 'Blind to Reason', entamé de façon assez genesienne par des harmonies vocales posées sur une guitare classique et calme, puis hardiment breaké sur un rythme lourd. Non content d’utiliser les recettes éprouvées du rock basique, Gingerpig n’hésite pas à s’aventurer en terrain plus progressif, histoire de titiller nos papilles auditives : 'Dimlighted Heart' est un bon exemple de pièce montée typiquement progressive, avec cette longue envolée de guitare qui ramène au thème initial. Les amateurs de (relatives) complexifications trouveront donc leur compte dans cet album, qui musarde également du côté de la soul ('Pipedream') ou du blues ('Digging With Bare Hands').
Alors, bien sûr, la recette n’est pas nouvelle et les amateurs de claviers regretteront peut-être un côté pas assez épicé, contrairement à la guitare qui est plus relevée (joli solo technique limite shred sur 'Indefinite Muddle Of Conspiracies'). Mais les gourmets ne devraient pas dédaigner cet album finement cuisiné, en équilibre entre nostalgie assumée et technique bien adaptée. Finalement la table était ici tout à fait recommandable ... Vous reprendrez bien un peu de Gingerpig ?