Déjà trois ans depuis la sortie de "Pure", mais il semblerait que ce soit devenu le régime de croisière de Pendragon. Et si ce délai peut paraître long, la bande à Barrett sait nous faire patienter en émaillant ces temps d'attente de témoignages 'live'.
Chaque annonce d'un nouvel album de Pendragon alimente les spéculations, les fans anciens espérant un nouveau "Masquerade ..." et les plus jeunes souhaitant un nouveau "Pure". Si la nouvelle orientation musicale du groupe déçoit peu ou prou les aficionados du néo aérien, elle accroche un nouveau public plus jeune et plus orienté metal. Est-ce que ce nouvel opus dénommé "Passion" va encore une fois les déchainer (les passions !) ? Rien de tel que l'écoute pour se faire sa propre opinion. C'est donc avec "Passion" que débute l'album (c'est à dire avec le morceau qui porte le même titre que l'album), une composition qui commence tout en douceur et se muscle vers la deuxième minute sans pour autant donner dans le métal hurlant. On y retrouve avec plaisir la voix rocailleuse de Nick Barrett posée sur lit de rock punchy, sans solo ni de guitare ni de claviers, et qui, malgré ses 5'27, parait diablement court !
"Empathy" démarre, directement enchaîné à "Passion" et semble en être la continuité parfaite. Ce titre est une des deux pièces épiques de l'opus (11'20) et il reprend complètement l'ambiance de l'introduction jusque dans des paroles communes : "Passion ? Give me some empathy". Sa généreuse durée permet à Barrett de nous asséner un solo dont il a le secret, bourré de feeling, auquel le 'sieur' Nolan répondra par une petite ballade pianistique débouchant sur une envolée symphonique de synthé. Le ton est donné, Pendragon n'a rien perdu de sa fougue et de son lyrisme. Et, puisque nous avons affaire à du prog, nous retrouvons les bons vieux trucs du chef : breaks, bruitages, chant doublé, riffs ronflants, .... tout ça étant utilisé ici avec des dosages savamment équilibrés et sans abus. Le temps d'évoquer la recette du bon néo qui réjouit le cœur de l'amateur et nous voilà arrivés à la deuxième compo longue : "This Green And Pleasant Land". Si les premières minutes sont calmes comme une promenade bucolique, le niveau monte lentement vers un break (vers 9'10) où le rythme s’emballe pour un final qui pète le feu !
Il n'y a pas vraiment de titres faibles sur l'album, et même l'ultime plage ("Your Black Heart") qui ressemble à une petite chansonnette sans grande envergure, donne à Nick l'occasion d'envoyer un solo d'environ 1'30 qui pourrait figurer au top 10 des soli qui collent des frissons. Musicalement, on pourra peut-être regretter la relative discrétion des claviers de Clive Nolan, mais on appréciera l'efficacité de Peter Gee, le complice de toujours, impérial à la basse comme au synthé-basse. Quant à Scott Higham, il confirme son intégration parfaite au sein du groupe, son jeu de batterie musclé donnant une puissance nouvelle à la musique du groupe (je vois des vieux fans intégristes qui font la grimace). A tout seigneur, tout honneur, ce concert de louanges ne peut s'achever que sur l'évocation des talents multiples de monsieur Barrett, auteur, compositeur, guitariste à la sensibilité exacerbée, mais aussi chanteur dont la voix rauque est chargée d'une expressivité qui compense largement un manque de technique parfois sensible.
"Passion" est une pierre de plus dans l'édifice musical de Pendragon .... Une pierre ? que dis-je un diamant ! L'interprétation puissante de certains titres déplaira peut-être à quelques amateurs de néo-prog caressant, mais l'intelligence et la profondeur des compositions devraient rallier l'approbation d'un public plus ouvert aux digressions hardeuses d'un rock décidément très progressif.