"A Day At The Races" arrive à peine un an après le très réussi "A Night At The Opera". Partant probablement du principe qu'on ne change pas une équipe qui gagne, Queen réutilise dans cet album toutes les recettes qui lui ont si bien réussi avec le précédent. A commencer par un troublant mimétisme dans le choix de la pochette : là où "A Night At The Opera" présentait les armoiries de ses seigneuries sur fond blanc, "A Day At The Races" les inscrit sur fond noir. Le blanc pour la "nuit", le noir pour le "jour", logique ! Les deux titres sont empruntés, dans l'ordre chronologique, à deux films des Marx Brothers, soulignant si cela était encore utile le caractère facétieux du groupe à cette époque.
Les compositions alternent celles de Freddie Mercury avec celles de May (4 titres), Deacon et Taylor (un titre chacun), légère différence avec l'album précédent où la première face s'ouvrait et se fermait sur deux titres de Mercury encadrant les compositions concentrées des autres membres du groupe. Ce qui ne change pas par contre, c'est l'extraordinaire diversité de la palette musicale que Queen propose, passant avec une facilité déconcertante d'un rock aussi pêchu que prévisible ('Tie Your Mother Down') à une valse décalée ('The Millionaire Waltz'), d'une bluette romantique ('You And I') à des chœurs gospel ('Somebody To Love'), d'un chant de guerre indien ('White Man') à une poignante chanson mélancolique ('You Take My Breath Away').
Certes, tous les titres ne sont pas de la même intensité et 'Long Away', 'You And I' ou 'Drowse' sont un léger cran en-dessous, même s'ils restent à un niveau tout à fait honorable. Aucun de ces titres n'est signé Mercury, dont le sens de la composition est à son apogée, magnifiant de sa voix extraordinaire chacune de ses compositions, aussi bien par les accents quasi-tragiques de 'You Take My Breath Away' et 'Somebody To Love' que par la fantaisie débridée et l'extravagance de 'The Millionaire Waltz' et 'Good Old-Fashioned Lover Boy'. Freddie Mercury brille également par l'intensité de son interprétation sur 'White Man', dans un registre guerrier et revendicatif assez inhabituel au groupe, et sa sensibilité sur l'émouvant 'Teo Torriate', chanté en partie en japonais.
"A Day At The Races" fournit de nouveau la preuve de l'incroyable éclectisme dont nos compères sont capables. Queen a la chance de disposer de quatre compositeurs talentueux, chacun ayant un univers musical propre, même si, incontestablement, Freddie Mercury joue dans la catégorie supérieure de par son inventivité sans limite. Cet album marque également la fin de l'âge d'or, Queen peinant par la suite à atteindre un tel niveau.