Behemoth fait du Behemoth. Tout est dit, cette chronique pourrait s'arrêter à ce stade. Finie l'époque où Nergal et sa bande de dégénérés étaient comparés à Satyricon, Graveland et autres Burzum. Surtout, exit le black-metal "old-school" de leurs premières démos datant de la fin du siècle dernier. Maintenant Behemoth joue dans la cour des grands du death-metal et sont volontiers comparés à un Morbid Angel ou à un Deicide. Depuis "Satanica", leur passeport pour la scène metal internationale en 1999, les polonais ont facilement trouvé une formule plus qu'appréciable, leur maison de disque Peaceville encourageant constamment Nergal à se dépasser en tant qu'auto-producteur de son groupe.
Après un "Zos Kia Cultus" très réussi, mais boudé par la critique et les fans de la première heure, "Demigod" remet les pendules à l’heure et se veut donc comme un album épique dans tous les sens du terme. Ayant maintenant les moyens de leurs ambitions, tout y est propre, poussé à fond, équilibré à la perfection, millimétré et surtout plus boosté.
Chaque opus des polonais contenant son lot de "tubes" , la descente aux enfers se devait de commencer avec un titre de la trempe de "Sculpting The Throne ov Seth" et sa très belle intro acoustique. Les OVNI qui nous rappellent aux grandes heures de la scène death metal scandinave s'enchainent alors avec une facilité déconcertante. Des morceaux comme "Demigod", "Slaves Shall Serves" et "Before the Æons Came" insistent sur le côté oppressant que Behemoth gonfle à bloc, même si la plus grande réussite de l'album reste "Conquer All", qui nous ramène aux théories développées par Aleister Crowley, que Nergal se délecte d'adapter en musique. Ce titre est une réussite absolue sur la longueur, un appel à la démence, un pur moment de death metal, où les deux guitares se parlent et se passent la balle sans arrêt. Et puis cette voix... l'ami Nergal est infatigable et pourrait faire penser volontiers à un certain David Vincent (Morbid Angel). Sur tous les morceaux, l'énergie qu'impose Behemoth, véhiculée par cette voix lourde et puissante et ces riffs imparables, est énorme.
Alors que "Towards Babylon" et "Slaves Shall Serves" restent des classiques, "The Reign ov Shemsu Hor" fait penser aux toutes premières heures du groupe, avec une intro black metal absolument délicieuse, proche d'un Watain récent. L'album se clot sur cette épopée de huit minutes dans laquelle les guitares sifflent, la basse écrase (littéralement) et le blast semble inépuisable. La folie furieuse s’arrête au bout de 41 minutes, juste ce qu'il faut pour ne pas lasser l'auditeur avec une formule éprouvée mais usante.
Une page de plus se tourne dans la large bible de Behemoth. Et vu le rythme effréné des polonais (dernièrement ralenti par la greffe de moelle osseuse de Nergal... on lui souhaite un prompt rétablissement!) on sait qu'ils ont encore de très belles années devant eux. Même si ma préférence va à "Thelema. 6", ce "Demigod" reste une des pièces maitresses de la discographie de la formation. Cet album reste à ce jour le plus gros succès commercial de Behemoth... On comprend pourquoi !