Après un premier album somme toute assez moyen sorti en 2007, les Suédois de Graveyard ont bénéficié d’une signature sur le label indépendant Nuclear Blast, bien connu pour son catalogue particulièrement fourni en matière de Heavy Metal. Le combo de Göteborg, véritable berceau du Death Mélodique, aurait-il donc pris l’option d’aborder un changement de style aussi radical en baptisant son deuxième opus "Hisingen Blues" ?
Il faut bien reconnaître que ce titre ne colle pas vraiment à l’image d’une maison de disque comme Nuclear Blast. Et pourtant, ce nouvel album est bien loin de faire pâle figure à côté des piliers et autres nouvelles formations brutales que ce label soutient avec un dynamisme constant. Dans ce contexte, Graveyard se différencie aisément par l’entremise du style qu’il pratique. Le Hard Rock teinté de psychédélisme issu des seventies, avec en prime un son de guitare vintage et râpeux associé à une coloration bluesy n’a effet pas grand chose en commun avec le fond de commerce de ce label allemand.
Les mots sont lâchés, encore un groupe de Hard Rock 70’s qui s’évertue à prêcher sa bonne parole. Mais dans ce domaine, Graveyard parvient à franchir un cap supplémentaire grâce à un Hard Rock entraînant et plein de bonnes vibrations. En quarante minutes, le groupe réussi à synthétiser plusieurs époques en juxtaposant les thèmes qui leurs sont propres. Sans parler d’empilage menaçant de s’effondrer, Graveyard maîtrise le gouvernail, à l’image de la très belle pochette de "Hisingen Blues". En effet, cet album transpire la spontanéité à la manière de Led Zeppelin, tout en mettant en relief un quatuor bien décidé à démontrer toute l’étendu de son talent.
Mais "Hisingen Blues" n’aurait pas cette consistance sans la performance vocale du guitariste/chanteur Joakim Nilsson. Sa tessiture chaleureuse, à mi-chemin entre Chris Cornell et Robert Plant, fait merveille sur l’ensemble des plages composant cette nouvelle production. Quant à l’aspect purement Blues, il rejaillit sur certains morceaux ("RSS", "No Good, Mr Holden") dans une veine bien plus proche du British Blues Boom, qui au passage a influencé des groupe américains comme Mountain ou dans une moindre mesure Grand Funk Railroad, que celle du delta du Mississipi. Graveyard sait aussi donner un élan southern sur des titres assez longs comme "Uncomfortably Numb" et "The Siren", dont les finish respectifs évoquent le Lynyrd Skynyrd des débuts. Le combo chevelu n’hésite pas non plus à surprendre en balançant un "Longing" dont le contenu pourrait facilement servir de soundtrack à un bon vieux Western Spaghetti.
"Hinsingen Blues" évolue donc tout en nuance sans oublier ce qui fait l’essentiel pour aboutir à un excellent disque de Hard Rock 70’s. De la conviction en passant par la sincérité et surtout par la manière très organique d’exposer sa prestation, Graveyard ne donne absolument pas l’impression de prendre un train en marche pour éventuellement raccrocher un mouvement qui perdure du côté de la Scandinavie (Three Seasons en est d’ailleurs l’exemple frappant). Avec un tel album à leur actif et le soutien d’un label digne de ce nom, Joakim Nilsson et ses acolytes n’ont certainement pas fini de faire parler d’eux.