Chic, un nouveau Nemo ! Et dans la continuité de l'excellent "Barbares", en plus ! Pour preuve, l'epic 'Loin Des Yeux', sous-titré 'Barbares, parties IX à XIII'. Ce nouvel opus, intitulé assez séditieusement "R€volu$ion", tiendra-t-il toutes les promesses de son prédécesseur ?
Dans la lignée de tous les albums de Nemo, "R€volu$ion" est un concept album, qui traite cette fois de la sujétion de l'homme à la société. Un propos ambitieux qui est à la fois une force et la faiblesse de l'ouvrage. Force quand les auteurs arrivent à alléger suffisamment le propos pour rester dans la suggestion, comme dans l'admirable 'Seul Dans La Foule', où le désormais quintette (David Zmyslowski est "titularisé" à la guitare, après moult concerts avec le groupe) réussit un atmosphérique de haute volée tout en finesse et virtuosité retenue. Faiblesse quand le discours s'appesantit - le texte de 'Loin des Yeux' est assez démonstratif en ce sens : saturé de bonnes intentions (" Quand certains prennent et ne laissent rien, les autres n'ont plus qu'à mourir de faim – quand certains usent et abusent de tout, les autres n'ont plus qu'à se laisser tomber à genoux"), mais assez border-line caricature, limite facilité schématique. Le fait n'est pas nouveau chez Nemo, il y a une candeur quasi-adolescente dans cette volonté de donner du sens au texte – une démarche ambitieuse, et parfaitement louable en soi. Mais quand le sens se fait plus lourd (ici, plus Politique, au sens noble du terme), l'auditeur se retrouve inévitablement plus exigeant. Ce défaut n'est en fait présent que dans les deux derniers titres de l'album ; ailleurs, en élaguant les propos, les auteurs ont réussi à trouver la bonne distance : 'Je Suis Un Objet' ou 'R€volu$ion' sont beaucoup plus efficaces avec moins de texte, et parviennent à trouver cet équilibre délicat et compliqué, ce qui est forcément très ardu à réaliser ; arriver à traduire des faits de société en chansons est un exercice auquel peu se sont risqués, mais où Nemo ne réussit que partiellement.
Côté musique, Nemo est une fois de plus dans l'excellence. Le début de l'album enchaîne avec brio les calmes instrumentaux d'introduction ('Liberté, Egalité, Insurrection', 'Aux Portes du Paradis') avec des morceaux dynamiques, équilibrés, militants, où les magnifiques interventions de JPL à la guitare – on ne compte plus ses solos réussis ! - complètent parfaitement les claviers de Guillaume Fontaine. 'R€volu$ion' est un morceau compact, efficace, virtuose, enthousiasmant ! Vocalement, JPL s'expose un peu par moments ('Notes Pour Plus Tard'), avec des séquences quasi a capella qui montrent encore des limites, mais sa prestation au chant est tout à fait correcte. Il serait dommage de ne pas souligner la belle présence des autres musiciens, et notamment la précision de JB Itier, toujours impeccable. Il y a très peu de moments en creux dans cet album, hormis la séquence cornemuse vers la fin de 'Loin des Yeux', un peu longuette par manque de relief, et qui place cet epic un peu en dessous de son illustre prédécesseur 'Barbares'.
Au bilan, encore un très bel opus que ce "R€volu$ion" ! En vérité, cet album ne peut que grandement satisfaire les fans de la première heure, et conquérir ceux qui ne connaissent pas encore le groupe. Manque juste encore un peu d'épure dans les paroles pour atteindre le Nirvana, mais Nemo est très proche du but !