La police ornant la pochette façon "âge de pierre de l’informatique" nous renseigne déjà quant au contenu de ce premier essai de Angst Skvadron, patronyme étrange pour la catharsis de T.B. aka Trondr Nefas, activiste bien connu dans l’underground norvégien pour sa participation au malfaisant Urgehal (parmi beaucoup d’autres !) : les années 70 ne sont pas loin. Amis des sonorités accrochées à cette époque à laquelle les groupes ne cessent de rendre hommage, ce disque est pour vous.
En effet, sur un subtrat clairement black metal, qui n’est d’ailleurs parfois pas sans évoquer les derniers assauts de Satyricon ("Slaves Of Mental Distorsion") viennent proliférer un fourmillement d’effluves seventies, dont le vecteur est notamment le recours aux synthétiseurs Moog. La relecture (non créditée) démoniaque du "Scorpio’s Theme" que composa Lalo Schifrin pour la BO du premier Inspecteur Harry avec Clint Eastwood, participe en outre de cette référence évidente. Cette reprise, en plus rapide encore, baptisée "The Astroid Haemorhoids And The Drunken Sailor", justifie à elle seule l’achat de cet album qui, en dépit de sa courte durée (à peine une trentaine de minutes pour six titres encadrés par une intro et une outro), s’avère être une vraie pépite, baignant dans un climat souvent aux confins de l’étrange et de la SF.
A sa façon, Angst Skvadron, avec un grand dépouillement, parvient à créer des atmosphères stélaires irréelles, d’où émerge une présence extraterrestre bien palpable. Psychédélique et lancinant certes, Flukt a cependant toute sa place dans le genre auquel il est rattaché. Les guitares, grésillantes comme il se doit (comme sur le monumental "Negativitetens Kveletak", que viennent éclairer aussi quelques voix féminines discrètes) et le chant rapeux témoignent notamment de l’ancrage au metal Noir, quand bien même les fans de Urgehal risquent de pas y retrouver leurs petits à cornes.
Admirateur de Yes, Pink Floyd, Black Sabbath ou bien encore Lynyrd Skynyrd, T.B. veut utiliser ce vaisseau solitaire, dont l’origine remonte vers 2004, pour épancher sa soif d’aventures musicales. Mais l’homme, sujet aux dépressions, y voit aussi un moyen, par le biais de textes très personnels, de se libérer de ces pensées noires et malsaines.
Flukt est donc un opus surprenant en bien des points, qui s’adresse de fait surtout aux plus ouverts d’entre vous. Ceux-ci s’embarqueront avec un plaisir non feint dans cette soucoupe volante pour un voyage dont on espère qu’il fera dans le futur d’autres escales.