Et si la maison Scorpions commençait à sérieusement se lézarder ? Après le départ du fidèle Francis Buchholtz, c’est au tour de Herman Rarebell, batteur à la puissance légendaire, de quitter le navire teuton, remplacé par Curt Cress, musicien de studio qui n’accompagnera même pas le groupe en tournée où il sera remplacé à son tour par James Kottak (Kingdom Come, Warrant), intronisé nouveau cogneur en titre. Voilà qui est finalement une bonne nouvelle tant Cress souffre de la comparaison avec Rarebell.
En même temps, lorsque l’on se penche sur le contenu de ce "Pure Instinct", le fait est que la frappe de mule de l’ami Herman n’avait pas franchement d’intérêt. En effet, si le titre et la pochette de ce nouvel opus pouvaient laisser espérer un retour à des compositions plus animales de la part de Meine, Schenker et Jabs, il ne faut pas se laisser abuser par le très bon "Wild Child" qui ouvre les hostilités avec son riff immédiat et ses accords de cornemuse. Car la suite va en décevoir plus d’un avec plus de la moitié des titres œuvrant dans le registre de la ballade. Il est vrai que les Scorps s’étaient fait une spécialité de ce style musical et que ce dernier leur a apporté leurs plus grands succès commerciaux, mais de là à tomber dans la guimauve jusqu’au cou, il y avait encore une marge que nous pensions suffisamment importante pour éviter à nos amis germains de se rétamer de la sorte.
Bien sûr, l’ensemble reste agréable et Meine & Cie sont toujours de sacrés compositeurs et interprètes. "Does Anyone Know" ou "You And I" sont des douceurs typiquement scorpionesques et feront probablement des singles en puissance, même si la seconde reste un peu mièvre. Par contre, si l’intimiste "Are You The One ? " conclut parfaitement cet opus sur une note délicate, "When You Came Into My Life" frôle l’excès de sucre avec ses chœurs synthétiques. Le reste oscille entre mid-tempi à écouter au volant ("Soul Behind The Face") et quelques titres un peu plus musclés mais d’un niveau très inégal, les refrains n’étant que rarement à la hauteur. Dommage pour celui de "Stone In My Shoe" qui aurait mérité d’être plus accrocheur, alors que celui de "Oh Girl (I Wanna Be With You) " est carrément lénifiant.
Difficile de savoir si le groupe est épuisé par le rythme infernal qu’il s’impose à enchaîner les albums et les tournées, ou s’il a décidé de tout sacrifier à ses ambitions commerciales, bien que sa présence sur le plateau d’une émission animée par Dorothée ne laisse que peu de doutes quant au choix de la seconde solution. Toujours est-il que sans être profondément désagréable à écouter, "Pure Instinct" laisse un regrettable goût de trahison mélangé à un excès de sucre très mauvais pour la santé de nos pavillons auditifs. A écouter en galante compagnie tout au plus !