Bien qu'il ne voit la nuit qu'aujourd'hui, Devilmentertainment Non-Stop a été en réalité capturé entre 2008 et 2009. Ce délai assez long prouve encore une fois la difficulté à exposer son art que subit depuis ses premiers balbutiements en 2003, J. Carlsson, l'unique membre de Plutonium, et explique en outre la proximité naturelle que ce second méfait entretient avec One Size Fits All, publié en 2007 et dont il poursuit le travail.
Comme d'autres avant lui (Mysticum ou Dødheimsgard par exemple, d'ailleurs volontiers cités par le maître des lieux), ce one-man band tente de faire coulisser deux corps qu'une froideur identique cimente, le Black Métal et la musique industrielle. Bien que différents, les deux genres peuvent parfois s'accoupler avec bonheur, si tant est que ce terme soit vraiment approprié pour qualifier une progéniture qui palpite d'un souffle noir, dès lors que l'ovulation est réalisée par des musiciens que guide une vraie vision artistique. C'est le cas du Suédois qui enfante avec Devilmenternainment Non-Stop d'une œuvre glaciale dans sa peinture déshumanisée d'un monde crépusculaire, et cent fois plus malsaine et inquiétante que tous ces crachats faussement sataniques que des goules sans imagination ne cessent de produire à la chaîne.
Aplats martiaux, riffs autoritaires, chants venimeux (trafiqués parfois), rythmiques syncopées et samples désincarnés définissent un art noir qui vibre au son d'une négativité tranchante. De véritables humeurs malfaisantes coulent dans les veines de cette œuvre qui, tout en respectant les Tables de la Loi édictées par les Grands Anciens (guitares grésillantes, vocaux écorchés...), vient lui greffer, là des nappes synthétiques quasi-progressives (comme sur "Unintelligent Design" notamment), ici des atours dictatoriaux.
Lancinantes parfois, rapides quand il le faut, d'une sévérité néanmoins mélodiques toujours ("Zero Swarm"), ces pulsations d'une beauté mécanique ("Hell Is All Around") vous emportent dans un tourbillon d'une froide brutalité et d'une ironie frissonnante que restitue bien le mastering de Peter Bjargö (Arcana, Sophia), maître des musiques sombres.
Devilmenternainment Non-Stop glace le sang autant qu'il hypnotise avec son Black Métal constamment pollué par des éléments extérieurs mais complémentaires. Carlsson s'amuse à perturber avec intelligence et une certaine réussite la ligne orthodoxe d'un genre dont il utilise les codes comme un humus maladif lui servant à faire proliférer l'organisme qu'il nourrit. L'opus ne fera certes pas l'unanimité auprès des ayatollahs mais elle suinte pourtant un fluide dont la noirceur viscérale ne saurait être mise en doute....