La plupart des compilations ont cette intention notoire, bien que jamais avouée, d’engraisser les maison de disques et bien entendu leurs petits protégés. D’autant que les collectionneurs se jettent dessus comme des mouches sur un plat avarié. Lorsque le label Slash sort le premier florilège retraçant la carrière de Faith No More, et ce un an après sa dissolution, les suspicions de profiter de la détresse des fans mènent alors bon train. Benny Hill sur la pochette, et la manœuvre pourrait tourner à l’absurdité. Eut égard à la setlist proposée sur le premier volet, simple accumulation chronologique des titres les plus courus des San-Franciscains, il sera difficile d’accorder plus de crédit à l’opération. Seul "I Started A Joke", reprise des Bee Gees inclue dans l’édition brésilienne de "King For A Day", déroge quelque peu à cette règle. Enfin, pas de quoi se pavaner devant une telle modicité de prise de risque, ni même en écrire une chronique.
Le véritable petit trésor de "Who Cares A Lot ?" se trouve dans son second volet, un écrin de huit bijoux plus ou moins bien taillés dont les quatre premiers sont des inédits. Comme il faut toujours laisser la place aux aïeuls comme dans les bus, parlons tout d’abord des quatre suivants qui s’affichent comme une des démos originelles d’"Introduce Yourself" sans Mike Patton (et donc avec Chuck Mosley) ainsi que trois live : un "Highway Star" (reprise de Deep Purple datant de 1997) musclé, rageur, au son de fonds de garage, "Theme From Midnight Cowboy" (déjà entendu sur "Angel Dust"), mais surtout ce magnifique "This Guy's In Love With You" chanson des années 60 magnifiée par le crooner Patton d’une incroyable puissance et justesse étant donnée sa gestuelle scabreuse lors de ce concert de 1997 devant un parterre d’Australiens galvanisés.
Enfin et surtout, l’écurie Slash lâche quatre nouveautés (ou presque) dont la première "The World Is Yours", issue des sessions d’"Angel Dust", cohabite parfaitement avec les envies de sillage plus progressif tracé par Faith No More à cette période. D’un tempo lent emmené par des guitares sombres et lourdes, la fièvre y est pourtant palpable. Le King au micro vomit son texte d’une voix tantôt grave, rocailleuse, ou par des hurlements stridents. Peut-être l’une des meilleures performances du Monsieur.
Le trio suivant provient lui des sessions de "King For A Day". "Hippie Jam Song", véritable Groove Métal à forte dose de funk, s’inscrit là dans une logique d’élargir encore leurs horizons comme se fut le cas avec les morceaux jazzy ("Evidence", "Star A.D.") ou plus latinos ("Caralho Voador") de ce même album. L’instrumental du même nom, longue redondance électrique, pour lequel Patton aura tout de même participé à l’écriture, tisse deux motifs principaux qui se répondent au rythme des martèlements de forgeron de Mike Bordin. Enfin "I Won’t Forget You" revoit Patton se métamorphoser en chien hurlant à la mort dans une démonstration de rock nerveux et sans fioriture, Roddy Bottum étant d’ailleurs mis sur la touche pour l’occasion.
La magie de ce groupe d’exception perdure encore grâce à ce diptyque. En sus des morceaux choisis d’une décennie entière faite d’élucubrations et de coups de génie, vingt minutes de titres inédits ne se refusent sûrement pas. A posséder par conséquent.