La jeune histoire du combo d’Atlanta n’est pas commune. En effet, ouvrir pour Marillion lors de la tournée à Montréal en avril 2009 et enchainer les festivals d’automne pour le compte de Pineapple Thief avec comme conséquence d’être pris sous l'aile de Bruce Soord, leader de ce même groupe, n’est pas donné à tous les groupes qui veulent se faire une place sur l’échiquier du rock alternatif/progressif moderne. Et comme si le destin n’était pas assez généreux, Sun Domingo voit Steve Hogarth (Marillion), Bruce Soord, Adrian Belew (King Crimson) et John Wesley (Porcupine Tree) participer activement à leur deuxième album Songs For End Times. Pour quelles raisons les dieux auraient-ils tout donné à ce jeune groupe ? On peut avancer les raisons les plus folles mais la plus vraisemblable est que ce groupe est porteur d’un talent insolent.
Tout ce beau monde n’a pas accordé sa confiance à n’importe quelle formation. Sun Domingo est tout simplement un groupe qui impressionne dès la première écoute de son disque. Hormis la première plage, instrumentale et atmosphérique, on bascule dans une musique très immédiate, légère, dont les mélodies sont presque évidentes. La première chanson, "Bound By These Rings", est surement trop typée pop pour convaincre, même si les prémisses à ce bien bel album pointent déjà. Le reste de Songs For End Times se montre plus complexe, dans un registre rock moderne et éclectique. Les noms prestigieux cités plus haut et qui accompagnent ce groupe dans son évolution peuvent être mentionnés pour essayer de décrire Sun Domingo. Mais il faut reconnaitre qu’il y a autre chose qui n’appartient qu’à ce quatuor génial.
Sun Domingo semble réussir là où les autres échouent, avec une facilité à créer de la pop de grande qualité avec notamment "It’s Happening Now" (avec un solo de guitare d’un toucher impressionnant), tout en montrant une aisance dans les formats plus exigeants comme l’instrumental "Meditation" (très proche des interludes acoustiques de 3). Tout cela emmené par des musiciens aussi experts que généreux dans leur approche de l’instrument, le guitariste chanteur Kyle Corbett en premier lieu.
Ce grand écart appelle le seul reproche que l’on peut faire à cet album, à savoir d’être un peu disloqué dans les styles abordés. Hormis cette légère critique de cohérence (aussi due à la présence de nombreux invités), il faut avouer que les compositions brillent souvent par leur propension à faire mouche instantanément. Cette diversité permet aussi d’entendre dans un même disque le meilleur du Dave Matthews Band avec "Find A Way Out", la déchirure de Jeff Buckley dans "Love Is All Around You", la puissance d’un rock moderne aux mélodies imparables magnifiée par la voix d’Hogarth ("Till Then We Wait") ou la folie instrumentale la plus libre dans "Mad Maze".
La présence de tous ces grands noms du rock est indéniablement un plus pour un jeune groupe. On ne saura jamais dans quelle mesure ce coup de pouce aura rendu la musique de Sun Domingo plus visible au milieu de toutes les productions actuelles. Au-delà de ces considérations il aurait été regrettable de passer à côté d’un groupe si réjouissant dont la musique colle si bien à l’époque.