Travellers est le nouveau projet mené par le prolifique Wojtek Szadkowski, une des figures de proue du néo-progressif polonais, impliqué entre autres dans quelques références du genre, Collage, Satellite, Strawberry Fields ou autres Peter Pan. Et si tous ces précédents projets évoluaient dans un genre plutôt bien balisé, quitte parfois à se ressembler les uns les autres, ce Travellers se veut porteur d'une nouvelle ambition, d'un style plus débridé mixant du progressif avec des sonorités ethniques, de la musique pop, de l'ambient ou de la new-age, le tout porté par la voix magique de Robin, alias Marta Kniewska, déjà présente aux côtés de notre homme à tout faire au sein de Strawberry Fields.
L'ouverture de l'album par Magic surprend effectivement l'auditeur habitué au néo polonais habituel : une première partie atmosphérique, naviguant entre Enya et les Cocteau Twins, où l'instrumentation cristalline n'est qu'un écho à la voix non moins cristalline de la belle. Au bout de cinq minutes, changement complet de direction : percussions ethniques tribales, musique progressive débridée, retour au néo, et voilà un joyeux melting-pot plutôt incongru après une telle entame. Et puis subitement, retour tout aussi inattendu à la case départ, musique façon Twin Peaks pour clôturer 11 minutes bien surprenantes.
Et ces grands écarts vont se poursuivre tout du long de l'album, entre sonorités habituelles (batterie au son bien électronique, pas toujours du meilleur goût, guitares qui accrochent délicieusement l'oreille façon Satellite…) et musique globalement très atmosphérique, pour ne pas dire ambient.
Si la mixture se veut plutôt digeste, les côtés parfois popisants imprimés aux mélodies viennent cependant casser la dynamique instaurée par les deux premières plages. C'est tout d'abord l'insipide Dreaming, chanson pop peu inspirée, qui vient refroidir l'enthousiasme de l'auditeur, puis ensuite et surtout quelques mélodies très moyennes qui viennent limiter l'intérêt des deux dernières plages. Voilà qui est bien dommage car celles-ci contiennent des passages instrumentaux vraiment intéressants.
Alors s'il ne fallait retenir que le côté positif de cette nouvelle expérience, je conseillerais au lecteur de se repaître de I Dream Softly et son thème répétitif, réalisant la parfaite synthèse de la direction souhaitée pour ce projet …
… projet intéressant et se démarquant des productions répétitives du sieur Szadkowski, mais trop inégal pour surclasser ses précédentes réalisations. Nul doute que le bonhomme va persévérer et trouver la bonne alchimie pour donner à ce Travellers la dimension que son ambition mérite.