Détenteur d'une forte identité, à laquelle ne cessent de s'abreuver depuis des suicidaires par cagettes entière, il aura suffi à Austere d'une seule offrande pour s'imposer comme le nouveau mètre-étalon de la dépression, position rapidement consolidée par deux excellents splits. Sa seconde véritable offrande, To Lay Like Old Ashes, sillonne un chemin identique à Withering Illusions And Desolation grâce auquel nombreux sont ceux à avoir découvert ces Australiens. La suite de "Coma", interminable (dans le bon sens du terme) plainte répétitive et instrumentale qui achevait ce premier galop d’essai, tend à le démontrer en créant un lien évident entre les deux albums.
Mais tout en demeurant fidèle à leur signature, laquelle repose sur ce goût pour les longues dérives hypnotiques de près de dix minutes et pour ses riffs entêtants en guise de fil d’Ariane, Austere n’en oublie pas de travailler son art. Ainsi, les touches plus mélodiques dont le duo s’est servi pour enrichir sa palette avec Bleak…, la récente collaboration avec Isolation, ont laissé de profonds stigmates.
Oh, n’allez pas croire que le tandem a mis du vin de messe dans son black métal, mais le chant clair tend par exemple à s’immiscer de plus en plus au milieu des hurlements possédés habituels. Et finalement, on se rend compte que l’ensemble, plus mélancolique que réellement dépressif et ce, en dépit d’un "Coma 2" qui suinte une tristesse vertigineuse, reste assez mélodique et accessible. Après "Down", une courte intro, To Lay Like Old Ashes prend son envol avec "To Fade With The Dusk", dans la droite lignée de ces aînés de deux ans. Même plastique, même lignes de guitares. Les aficionados sont rassurés.
Mais pourtant très vite, Sorrow et Desolate viennent perturber cette trame connue. "The Dreadful Emptiness" donne l’impression d’emprunter une direction attendue mais il y a ces ruptures surprenantes qui casse la ligne droite et ouvrent des espaces où le temps est suspendu, avant que le tempo ne s'emballe par le biais d’accélérations frénétiques. Succédant à un début plutôt classique, "To Lay Like Old Ashes" caresse ensuite les cieux, flirte avec le grandiose, dont le vecteur sont ces chœurs envoûtants et ces atmosphères belles et grisantes, cependant que "Just For The Moment" est entièrement piloté par une voix claire poignante et inspirée. Seul "Coma II" donc, ne surprend pas, mais il sécrète un tel désespoir lancinant et insidieux qu’il est impossible ne pas être envahi par une vague émotionnelle. Encore une fois, Austere atteint l’orgasme avec un sens du minimalisme admirable qui ne se confond jamais avec pauvreté.
S’il ne se hisse pas tout à fait à la hauteur de son magnifique devancier, To Lay Like Old Ashes témoigne toutefois du talent immense de ses auteurs qui parviennent à petites touches à renouveler leur black métal. Austere est déjà grand et on ne peut que regretter son sabordage au goût d'inachevé que ni Woods Of Desolation ni Grey Waters, deux des projets qui occupent actuellement ses anciens membres, ne réussiront à remplacer...