Découvert en 2009 grâce un modeste split partagé avec un autre joyeux drille du même genre que lui (Eindig), Vesano rejoint cette cohorte sans cesse enrichie d’escadrons de la mort de série B ruminant leur mal-être dans le sillage des Xasthur, Forgotten Tomb, Striborg et consorts. Si ce n’était son origine géographique (le Brésil), rien ne saurait distinguer ce trio de ses autres doloristes qui pullulent depuis quelques années.
Sans grandes surprises, aussi bien dans le fond que dans la forme, on y croise de nouveau ce chant (forcément) écorché, qui hurle sa haine et son désespoir comme le genre le réclame, ces riffs paresseux englués dans la dépression la plus misérable, cette rythmique autiste qui permet au batteur d’aller pisser entre deux coups de caisse claire, cette prise de son binaire, sans oublier le bonne vieille pochette en noir et blanc qui fait mentir l’adage selon lequel "l’habit ne fait pas le moine".
Mais voilà, le Black-Metal suicidaire, comme son (plus ou moins) lointain cousin le Funeral Doom, a ses raisons que la raison ignore et Gritos do Tempo, pour aussi peu surprenant qu’il soit, se contentant de suivre les rails sur lesquels ses auteurs l’ont posé, réussit à injecter dans nos veines déjà bien labourées, son sombre venin. De fait, des perles lépreuses telles que "Ondas" ou "A Marca" notamment, finissent par nous engourdir par leur (fausse) somnolence. L’ensemble avance à 2 à l’heure et on se doute bien que si les Brésiliens voulaient accélérer un peu la cadence, ils pédaleraient assez vite dans la semoule, mais lorsqu’on aime ce type de Black Metal, ce qui importe est la capacité à appuyer sur l’interrupteur et là où ça fait mal, sur les plaies encore béantes. A sa manière, modeste mais sincère, Vesano sait distiller un climat mélancolique sans pour autant sombrer tant que cela dans le gouffre de l’indicible. Malheureusement !
Car, comme bon nombre de groupuscules en provenance d’Amérique Latine et bien qu'il réussisse mieux à exprimer une douleur masochiste et suicidaire que la plupart de ses compatriotes, le groupe peine à rivaliser en terme de noirceur désespérée avec ses partenaires de souffrance venus du Nord. Quand bien même chez certaines formations portugaises (Ars Diavoli) ou californiennes (Leviathan), par exemple, le soleil n’a finalement que peu de prise, les terres écrasées par la chaleur ne pourront jamais tout à fait offrir le terreau favorable à la prolifération de cette engeance dépressive. Reste que ce premier méfait de Vesano peut faire office de solide petite corde pour se pendre, ce n’est déjà pas si mal…