S’il n’est pas québécois (le label ne signe quasiment que des hordes issues du terreau local), Borgne a néanmoins toute sa place au sein de Sepulchral Productions, écurie que le Suisse a rejoint pour cette quatrième offrande. En effet, à sa manière, certes différente de celle le plus souvent retenue par ses désormais compagnons de label (Sombres Forêts, Monarque…), Borgne a recours à une forme d’expression noire d’inspiration dépressive. Seulement, il la matérialise avec une densité inouïe.
Souvent aux confins de la musique industrielle, ce que confirme le recours aux machines et à une boite à rythme, Bornyhake, la silhouette derrière ce projet, trace une bande-son apocalyptique et absolument terrassante. Loin d’amoindrir la portée nihiliste de cette cathédrale de fer, les claviers participent au contraire de l’érection d’un dôme ténébreux.
Encadré par deux instrumentaux, "Ceres" et "Varuna", qui respectivement ouvrent et ferment la marche funèbre, les quatre plages qui se succèdent ont quelque chose de golems monstrueux emportés par une cascade de haine et de négativité. C’est particulièrement vrai pour le furieux "Orcus" où le Suisse vocifère comme si demain ne devait pas exister.
Le maillage, ultra serré, procède du caractère sauvage d’une plastique à la fois fiévreuse et désincarnée, glaciale et inhumaine. Une structure parfois très longue (9 minutes pour "Sedna", lequel avale l’espace d’une manière effrayante, et "Eris" au souffle qui prend aux tripes avec son final superbe qui meurt peu à peu), offre le décor idoine pour installer des ambiances décrépies de fin du monde.
Brutal et intense mais d’une beauté hypnotique infernale quand les machines, toujours au premier plan, fusionnent avec ces motifs black-metal rapides et déchirants ("Haumea"), IV est le genre d’albums qui creusent de profondes crevasses dans la mémoires et surtout dans la chair. Seule sa (trop) courte durée tempère notre enthousiasme. C'est peu...