Certains projets semblent aussi éprouvants à mettre sur pied qu’au final à digérer pour l’auditeur. "ProgXpriMetal" est un peu de ceux-là : initialisé en 2006, l’enregistrement se sera tout de même déroulé sur trois longues années. Un délai qui n’aura pas entaché le côté jam-session de ce métal progressif à haute dose expérimentale et technique. Mené à terme grâce au savoir faire d’un quintet de cadors suédois, pas forcément très connus mais encore moins déméritants, il est le déversoir alambiqué de l’inventivité sans fin de ses amateurs de métal extrémiste, hard rock et des bizarreries de Frank Zappa .
Bien qu’à l’origine conçu comme une œuvre instrumentale, c’est à Björn Jansson (Tears Of Anger, Ride The Sky) que furent laissés les vocaux sur nombre de pièces de ce colossale puzzle. Et malgré la virtuosité insolente de ses camarades de jeu (Morgan Ågren, qui a déjà maltraité ses fûts sur l’album solo de Fredrik Thordendal, guitariste de Meshuggah, est d’ailleurs proprement monumental) , il faut bien avouer que son timbre, pas si loin de celui de Jorn Lande, s’accorde parfaitement à l’ensemble. D’autant qu’il ne devait pas être aussi aisé d'immiscer sa voix dans ce patchwork de styles et de sonorités. Car au-delà d’un métal progressif de la stature de Liquid Tension Experiment, froid, ébouriffant de maîtrise, de solo et de changements de rythme, ces artisans du son façonnent leur empire en puisant dans un vivier d’éléments groovy, de guitares psychédéliques, de rythmiques funk, d’ambiances jazz, et bien d'autres...
On peut ainsi s’enivrer de guitares espagnoles ("Vargton" voire "Capriccio"), de transes hindoues à base de cithare indienne ("Rjoredraggu"), de comptines diaphanes ("Norrsken") où guitare sèche et piano se lovent tendrement. Au-delà de ces quelques exceptions au schéma structuré semble t-il réellement préparé, d’autres compositions paraissent clairement être en roue libre, rejetons hybrides nés d’altercations improvisées où les constructions s’entortillent dans un tohu-bohu que l’on sait tout de même maîtrisé ("Tokeri 1", "Tokeri 2"…)
A n’en pas douter, s’aventurer dans les sables mouvant du Vargton Projekt, c’est patauger durant 75 minutes dans un paysage labyrinthique duquel peut-être certains ne reviendront pas. A bon entendeur: bon voyage !