Nonobstant sa réelle maîtrise dans l’expression d’un spleen diaphane et d’incontestables progrès par rapport à son galop d’essai, sorti il y a juste un plus d’un an, la problématique demeure inchangée concernant An Autumn For Crippled Children à savoir que les Hollandais souffrent toujours d’un manque évident de personnalité, donnant l’impression de butiner chez les autres au grè de leurs envies (et de leur porte-monnaie ?).
De fait, si Lost braconnait sur les terres du Dark Metal à la Katatonia, alourdi plus encore par une bonne couche de Doom/Death, Everything trahit le goût de ses géniteurs pour le Post Black dépressif au combustible emprunté à la mouvance Shoegaze dont il épouse certains traits tels que le chant clair et fragile, les riffs grêles ("I Am The Veil"), cependant que la référence aux suédois , bien que plus diffuse, demeure toujours perceptible (sur "Absence Of Contrast" et "Cold Spring" notamment). Le nom des deux opus, ainsi que leur visuel respectif (un fauteuil roulant au milieu du chaos pour le premier, un ciel automnal en noir et blanc pour le second) traduisent ce passage d’une influence à une autre.
Bref, cette seconde offrande ne nous apprend pas grand chose de plus sur ce trio, hormis le fait qu’il paraît se chercher encore, hésitant entre plusieurs directions toutefois complémentaires et peu éloignées les unes des autres car bâties sur des racines communes. Ceci étant, Everything s’avère être un disque tout à fait solide, bien fait et plaisant pour qui se sent l’âme mélancolique et (un peu) suicidaire mais pas trop tout de même. Soignées et toujours assez courtes (comprendre qu’elles respectent un format traditionnel), les compositions répandent leur tristesse ferrugineuse avec une certaine inspiration.
"Her Dress As A Poem, Her Death", "Rain" et surtout l’inaugural "Forever Never Fails" alimentent ainsi la valeur ajoutée d’une œuvre qui a plus de charme que sa devancière mais guère plus d’identité quand bien même An Autumn For Crippled Children en misant davantage sur ses penchants pour le Black Metal, que véhiculent des lignes vocales plus écorchées que sur Lost, peaufine une signature dont on devine à la fois qu’elle n’est pas encore bien définie et qu’elle n’aboutira probablement jamais sur une œuvre ni vraiment personnelle et encore moins majeure. Reste au final un projet qui ne saurait passer pour autre chose que de la série B, aussi intéressante soit-elle, et un honnête pis-aller auquel il manque ce petit plus indéfinissable qui séparera toujours l’artiste de l’artisan.