Baigné d’influences outre-atlantique, notamment reggae (ses deux références se nomment Ben Harper et Bob Marley… et il a déjà partagé la scène avec quelques grands noms de la musique américaine, citons au moins Jimmy Cliff et Matisyahu), Trevor Hall est un jeune compositeur de Caroline du Sud qui signe ici son 4ème album studio, s’inscrivant logiquement dans les rails de son inspiration de prédilection, tout en nous réservant quelques surprises de parcours. Il s’entoure par ailleurs d’une équipe avisée, pour qui la pratique musicale en ces territoires sonores et rythmiques n’est pas née de la dernière pluie (Aaron Dugan dispose d’une longue expérience de guitariste auprès de Matisyahu). Signalons également, pour cet opus, une étroite collaboration de co-écriture avec son producteur et ingénieur du son, Jimmy Messer, ce qui peut expliquer une certaine différenciation d’orientation artistique, par rapport aux réalisations précédentes.
Cela commence par 'The Return', acquis à la cause spirituelle du Reggae, mais aux couleurs sonores du Ska jamaïcain, et sur un élan narratif de Rhythm & Blues… Des influences somme toute assez voisines, mais dont le mélange, lui-même associé au vocal granuleux de Hall, semble habiller l’enveloppe acoustique d’un nuage sonore vaguement électro. Moderne, et agréable à l’oreille !
Et puis, vient la surprise majeure de l’album, avec l’inénarrable et enflammé 'Brand New Day': l’artiste nous offre ici un moment unique, défiant la loi des genres. Une sorte de Pop en Hip-hop universel, aux strates sonores talentueusement imbriquées les unes entre les autres, et dont les harmoniques semblent émaner de tous les styles musicaux. Foisonnant, intense, savamment cohérent dans la pluralité de ses composantes instrumentales, rythmiques et mélodiques, et doté de chœurs aériens surplombant les vocalises électrisées de l’artiste, ce morceau délivre une véritable fièvre festive et euphorisante. De l’aveu de Trevor Hall, la composition a été inspirée de la vie et de l’œuvre du philosophe hindou Swami Vivekananda, prônant les vertus d’une complémentarité entre action et spiritualité; et en effet, il suffit de jeter un coup d’œil aux paroles visuelles du clip, que vous pourrez découvrir à la suite de cette chronique, pour en mesurer son ardeur dogmatique.
L’album tente de réitérer le coup de maître de 'Brand New Day' à deux reprises, avec 'Dr.Seuss' et 'The Love Wouldn’t Die', mais sur des méthodes un peu moins audacieuses - néanmoins, ces deux titres porteront très honorablement les couleurs du projet, eux aussi. On notera également quelques fraîches inspirations aux accointances électro-rap, et comedy rock à la Randy Newman ('Fire' en particulier).
Le reste s’écoute sans déplaisir, mais s’abstient de révolutionner les registres parcourus. De ballades dispensant un blues-rock insouciant ('All I Ever Know', 'Good Rain'), un peu folk et vaporeux ('Te Amo') ou davantage rythmé et décomplexé ('Different Hunger'), fréquemment sous la bannière d’élans reggae/ska aux sonorités cuivrées, jusqu’aux longues prières tribales et étouffées des quelque 19 minutes de la clôture, Hall semblerait presque, par moments, s’endormir sur les acquis représentés par les piliers du projet. Piliers disposés, remarquons-le, de manière à asseoir correctement l’édifice: 'Brand New Day' en 3ème plage, 'Dr.Seuss' en n°7, et 'The Love Wouldn’t Die' en 10ème place… Un peu dommage en définitive que ce concept d’hybridation musicale à la puissante synergie multiculturelle n’ait pas été poussé encore plus loin. Ça y’est, on entend déjà les voix qui s’élèvent: à Music Waves, ils ne sont jamais contents…
Quoi qu’il en soit, veuillez noter en lettres capitales que l’album mérite le détour, notamment pour certains moments prodigieux, représentants (inédits ?) d’une Pop tribale et moderne, accessible et indomptable, mélodique et inclassable !