Un an après le controversé "Road Salt One", les imprévisibles Suédois de Pain Of Salvation reviennent comme promis avec le deuxième volet, "Road Salt Two". L'album de 2010 avait surpris une partie des fans du groupe et de la critique par ses aspects un peu rugueux l'éloignant des compositions plus sophistiquées auxquelles le groupe nous avait habitué. Avec une année de recul, force est de constater que l'impression de simplicité laissée par cet album n'était qu'un leurre : des écoutes successives ont permis de découvrir toute la richesse de titres apparemment frustres et les réserves émises à l'origine sont tombées devant le charme d'un album dont le plus gros défaut était de trop bien la cacher.
Pourquoi cette longue introduction sur "Road Salt One" ? Tout simplement parce qu'à l'origine, Pain Of Salvation avait envisagé de sortir un double album, ce projet ayant été bouleversé par l'annulation d'une tournée et la faillite de leur label. Daniel Gildenlöw qui s'y refusait au départ a donc réparti les chansons écrites en deux albums différents sortis à un an d'intervalle. Cependant, les titres de "Road Salt Two" étant issus du même processus créatif que ceux de "Road Salt One", et pensés qui plus est comme un tout, il serait étonnant que le résultat soit très éloigné de la précédente production des Suédois.
Et effectivement, même si "Road Salt One" est sous-titré" Ivory" là où "Road Salt Two' s'appelle "Ebony", même si la pochette du disque de 2010 est blanche là où celle de la présente production est noire, il ne faut pas escompter retrouver ce contraste entre les deux albums. D'ailleurs, comment Pain Of Salvation aurait-il pu faire un disque plus noir que "Road Salt One" ? Ce sont bien les mêmes ingrédients qui ont servi à composer les deux galettes, et c'est tant mieux : un son relativement brut, une prédominance des guitares soutenues par une batterie et une basse parfois explosives, des ambiances sombres, angoissantes, torturées, souvent soulignées par le travail discret mais efficace de Fredrik Hermansson aux claviers, des mélodies, ou plutôt des non-mélodies complexes, et un chant charismatique propre à hanter vos cauchemars. Si aucun titre ne se détache clairement comme un hit potentiel, aucun n'est non plus vraiment à la traine. L'ensemble fait preuve d'une belle homogénéité, ce qui ne signifie pas que le disque soit uniforme, loin de là. Le choix est vaste entre le hard rock zeppelinien de 'Conditioned', la ballade acoustique de 'Healing Now', l'emphatique 'To The Shoreline', le subtil '1979', le lourd et métallique 'Mortar Grind' ou le presque progressif 'The Physics Of Gridlock' (où Daniel Gildenlöw se fend d'une partie mi-chantée, mi-déclamée en français). Mais, et c'est là la magie de Pain Of Salvation, tous ces titres semblent solidaires et l'album ne prend tout son sens que si on l'écoute d'un bloc, comme c'était déjà le cas pour "The Perfect Element" ou "Be".
Pain Of Salvation maitrise à la perfection l'art de la nuance, et utilise sans retenue piano subito et autres sforzando conférant tant de charme et de relief à sa musique. Quelle que soit la couleur qu'il veuille lui apporter, il y réussit sans jamais donner l'impression d'à peu près ou de factice, dégageant une densité et une émotion que peu de groupes sont capables de fournir sur la durée. "Road Salt Two" est une nouvelle pierre qui s'ajoute au magnifique édifice musical construit par l'un des meilleurs groupes de ce début de XXIème siècle.