Tiens, revoilà The Tangent ? Ou plutôt, Andy Tillison nous revient avec une moitié de nouvelle bande autour de lui : réduit aujourd'hui (je n'emploierai pas le qualificatif de désormais, car à chaque album suffit sa peine, d'autant que le bassiste a depuis quitté l'aventure !) à un quatuor, avec l’absence du fidèle Guy Manning mais de nouveau épaulé par le fidèle Theo Travis aux flûtes et saxophones, le groupe anglais nous revient avec son 6è album studio, évoquant les technologies de la communication, tant du point de vue de leurs aspects positifs que négatifs.
A l'inverse de la majorité de ses prédécesseurs, et hormis un solo de guitare (lequel ?) offert à un fan et transmis par le net, l'enregistrement de ce nouvel opus s'est réalisé en studio, avec la présence des différents musiciens, comme un pied de nez aux technologies sujettes du projet !
The Wiki Man ouvre l'album du haut de ses 20 minutes, réunissant tous les ingrédients nécessaires à la bonne composition d'un tel monument. Démarrage instrumental où les quatre instrumentistes se mettent tour à tour en valeur, une rythmique "marillionesque" (Grendel) qui reviendra à plusieurs reprises tout du long de la plage, et surtout, surtout, des thèmes courts qui s'entremêlent, apparaissant et disparaissant à foison. J'aperçois déjà les vieux progueux hocher de la tête sur les mesures syncopées, commençant ainsi leur voyage vers leur galaxie musicale de prédilection ; comme à son accoutumée, The Tangent réussit la performance de sonner à la fois vieux et moderne !
Après un chant au mix douteux et un accompagnement parfois minimaliste sur les couplets, (part 2), la plage reprend rapidement ses aises par la grâce de chorus plus "académiques" et réconfortants sur les refrains, et surtout avec un solo de guitare enchaîné à une plage jazz-prog, suivi d'un atterrissage en pente douce vers le "mi-temps", rappelant plus que furieusement les groupes de néo-prog des années 90 qui usaient régulièrement du procédé. La suite propose un style plus british / Canterbury, avec de nombreuses interventions de flûte, et un final reprenant les éléments du début, bouclant ainsi un nouveau "monument" musical !
Plus modernes, The Mind's Eye et Tech Support Guy marquent clairement l'adéquation entre le sujet de l'album, et la musique proposée… Et par la même occasion, une certaine évolution dans le style de The Tangent. Dissonances harmoniques, voix en décalage par rapport aux instruments, le tout servi sur les recettes de bases, à savoir des claviers très présents et une guitare rarement mise autant en valeur dans les albums précédents. Dans ce contexte, Shoot Them Down, ballade reposante mais de peu d'inspiration et réellement lénifiante, peine à trouver sa place auprès d'autant d'inspiration.
Enfin, pour clôturer le festin, un deuxième épic vient évoquer les communications en Morse émises par le Titanic lors de son naufrage, et qui auront permis de sauver de nombreuses vies. Après un démarrage très symphonique, les ambiances typiquement londoniennes, portées par le saxo, la flûte et l'orgue, et si bien rendues dans l'album précédent, se mettent en place, alternant avec des passages jazzy et un refrain dynamiques en diable. La guitare du jeune Luke Machin envoie des saillies régulières, se mettant au diapason de la dextérité de ses camarades plus âgés. Autre sommet de l'album, Titanic Calls Carpathia déroule ainsi ses 16 minutes en révélant ses multiples atours au gré de plusieurs écoutes successives.
Lorsque j'ai découvert The Tangent avec A Place in the Queue, je dois franchement avouer que j'étais peu enclin à apprécier les musiques marquées du sceau de la "Roine Stolt Touch". Passés les deux premiers albums, ce temps est désormais bien révolu et le groupe possède son identité propre depuis maintenant plusieurs années, la faisant évoluer lentement mais avec conviction et certitude. Comm illustre parfaitement cette tendance, et comporte tout ce qu'un amateur du rock progressif peut attendre d'une production actuelle, mariant à merveille les influences anciennes à la modernité de l'époque, le tout au service d'une inspiration de qualité. Il se présente en tout cas comme une nouvelle réussite pour Andy Tillison et sa bande.