The Northern Religion Of Things n’est pas à proprement parler le véritable successeur de A Sense Of Loss, publié voilà déjà deux ans mais une manière de (re)visitation du répertoire de Giancarlo Erra dans une forme encore plus dépouillée que les versions originales. Certaines mauvaises langues, en rattachant l’exercice à une banale entreprise de relecture acoustique à la mode, argueront sans doute que l’Italien fait preuve d’un manque d’imagination. A tort, car outre le fait que la musique aux teintes pastel peinte par Nosound est par nature à même de se fondre à merveille dans un format vierge de saturation électrique, cet essai dépasse en réalité largement le cadre du simple dégraissage pour s’inscrire comme une œuvre originale et à part entière que l’on ne saurait négliger. De plus, Giancarlo ne s’est pas contenté de réarranger une poignée de ses compositions passées puisque, il a capturé ces relectures lors de répétitions préparant un concert en solo à Londres en août 2010, avant de les retravailler en studio, happening sonore vaporeux qui transporte l’auditeur très loin en une ballade automnale et désenchantée.
De ce double paradigme (acoustique et live) découle un album plus posé et squelettique encore que ne le sont ses prédécesseurs dans lesquels pioche le groupe italien dont la préférence se dirige vers Lightdark (presque la moitié du menu), soit l’opus le plus imprégné de l’influence No-Man, side-project précieux de Steven Wilson et du chanteur Tim Bowness, lequel a par ailleurs collaboré à cette offrande qui permis à Nosound de décrocher par la suite un contrat avec Kscope, label accueillant une poignée d’artistes tous unis par des approches parfois différentes mais cependant complémentaires d’un Rock plus intimiste que progressif.
De fait, ces racines anglaises, très légèrement gommées par A Sense Of Loss aux couleurs plus méditerranéennes, remontent à la surface de ce Northern Religion Of Things sur lequel plane l’ombre de Bowness, le chant aussi doucereux qu’émotionnel de Giancarlo évoquant fortement celui, plus suave peut-être, du dandy britannique. D’une dimension introspective évidente, l’œuvre, lumineuse et aérienne, a quelque chose d’une déambulation rêveuse à la mélancolie tranquille. Puisant aussi bien dans Sol 29 ("Hope For The Future, "The Broken Parts"…), Lightdark ("About Butterflies And Children", "The Misplay") et bien entendu A Sense Of Loss ("Fading Silently"…), l’art de Nosound se fait plus insalissable que jamais, chaque respiration, que ne viennent jamais appuyer de quelconque traits rythmiques, paraissant dans cette configuration diaphane aussi immatériel qu’une brise de fin d’après-midi.
Kaléidoscopes d’images délavées où tendent à s’effacer leurs contenus, elles confinent à l’épure hypnotique, à l’impression par petites touches vibrantes de couleurs diaphanes, représentation d’une réalité qui s’évapore peu à peu que dessinent une guitare pointilliste, belle comme une plage en hiver, quelques nappes de claviers doucereux et un chant fragile qui semble toujours à deux doigts de se briser.
C’est délicat, jamais ennuyeux et on peut affirmer que Giancarlo Erra n’est plus très loin de rivaliser en terme de justesse de ton avec un No-Man pourtant brillant. C’est dire ! The Northern Religion Of Things est un bijou d’ambiances intimistes et feutrées et une des plus belles réussites à mettre à l’actif de cet artiste d’une rare inspiration.