Avec la publication de The Journey, c'est un projet vieux de 16 années que concrétise enfin Erik De Beer avec son Life Line Project, après plusieurs versions travaillées, enregistrées et remises à nouveau sur l'ouvrage. Le concept original, Journey To The Heart Of Your Mind, occupe la totalité d'un premier CD. Et notre ami hollandais ne faisant pas les choses à moitié, il l'a complété par une deuxième galette, collection plus hétérogène de titres d'origines variées, mais nous y reviendrons.
Place tout d'abord au concept qui tient l'album, et à cette œuvre de plus d'une heure découpée en 16 plages, abordant notamment les thèmes de la cupidité ou de l'envie, à travers une introspection approfondie du narrateur.
Musicalement, l'ensemble se tient autour d'un thème principal mélancolique qui va être répété tout au long des différents titres, présentant moult variations, tant harmoniques que rythmiques, mais également dans le choix des instruments qui l'interprètent. Le style est résolument orienté vers un progressif symphonique typique des années 70, dans lequel le manque d'effets de manche est largement compensé par la qualité des mélodies et des harmonies.
Comme à son habitude, Erik de Beer s'est entouré d'une pléiade de vocalistes et d'instrumentistes, ces derniers couvrants à la fois un registre rock classique, mais également un large éventail de sonorités symphoniques ; hautbois, clarinettes, basson, piano de concert ou encore orgue d'église sont ainsi mis fortement à contribution, en contrepoint des parties aux senteurs progressives des 70's dominées par le Hammond, voire même en tant qu'intervenant unique, notamment lors d'interludes ciselés tels de la dentelle (Turn The Page ou encore Forgotten Page ). Plus nombreuses qu'à l'accoutumée, les interventions vocales combinent parties féminines lumineuses (Doubt) et harangues masculines sur les titres les plus vindicatifs (Join Us !).
Alors certes, comme pour les autres productions de Life Line Project, le tout sonne quelque peu daté, d'autant plus qu'Erik de Beer rechigne toujours à l'utilisation des technologies modernes de production offertes par les ordinateurs. Au-delà de cet aspect finalement superficiel, reste une qualité de composition hors-norme, qui accroche l'oreille dès les premières secondes pour ne plus la lâcher, et une cohérence évidente tout du long de cette première heure musicale.
D'inspirations plus diverses, le deuxième CD, The Narrow Path présente un profil naturellement plus hétéroclite, où se mélangent pièces d'inspiration classique (les deux Miniature), une adaptation d'une pièce de la Renaissance (The French Wrench), quelques "oldies but goodies" du groupe (Does It Help ? ou encore une création motivée par l'actualité récente, "hommage" au printemps arabe et désaveu face à l'intervention armée en Lybie déclenchée par notre cher Président (The Narrow Path). Plus varié mais peut-être moins homogène que son collègue de boitier, ce deuxième CD s'apprécie plus sur la durée, les ambiances présentes sur un titre comme The Narrow Path prenant rapidement tout leur sens une fois le contexte connu.
Toujours aussi prolifique, Erik de Beer nous gratifie d'un nouvel album qui, s'il ne vient pas révolutionner le style désormais bien établi pour son Life Line Project, propose autant à écouter qu'à méditer, les ambiances parvenant à coller à merveille au sujet de chaque titre. Ne boudez pas votre plaisir, prenez le temps de (re)découvrir cet artiste, de ceux dont la rareté ne devrait qu'encourager tout un chacun à continuer de les soutenir en achetant leurs productions.