Voilà le genre d’album que l’on découvre par hasard, en feuilletant un canard dissertant de l’actualité musicale d’un groupe de magasins culturels, et dont le moins que l’on puisse dire est qu’il fut difficile à trouver dans le réseau de distribution "classique". Et pourtant … Freegh est le projet du multi-instrumentiste Pierre Emberger, auteur de plusieurs essais en groupe ou en solitaire, dont un opéra rock en 1997 particulièrement remarqué alors par un réseau de distribution de biens culturels (un autre) bien connu. Et puis, inspiré par une nouvelle de Anne et Daniel Meurois-Givaudan (une pièce à celui qui les connaissait avant de me lire !), notre artiste décide de réaliser une œuvre conceptuelle, intégrant des éléments musicaux empruntés aux grandes heures du rock progressif.
Et dès les premières mesures de All That You Deserve, c’est une véritable claque sonore qui envahit les oreilles de l’auditeur : rarement on aura entendu une production aussi claire, aussi limpide, mettant aussi bien en valeur chaque instrument, et sublimant la voix chaude au registre étendu de Pierre Emberger. Impressionnant ! La guitare acoustique emplit l’espace tandis que la basse ronronne tranquillement, l’harmonie étant à peine troublée par quelques saillies de guitare électrique, alors que les claviers assurent une ambiance symphonique mesurée sans jamais être envahissante. L’ensemble se révèle ainsi tout bonnement magique. Et que dire de la qualité d’écriture ! Mélodie imparable, accompagnement soigné … le singulier employé ici pouvant se décliner au pluriel pour chaque morceau.
Et loin de singer ses illustres ainés cités en référence dans le livret (Yes, Peter Gabriel ou encore Pink Floyd), Pierre Emberger écrit sa propre partition, intégrant certes quelques éléments faisant penser à … (I Won’t Cry rappelant Welcome To The Machine de Pink Floyd par exemple), mais lorgnant également du côté de quelques cadors des années 80 comme James (Dandelion Mandala ou encore U2 (Old Times Belong To The Living). Et puis, comme pour tout grand album, LE moment de grâce, qui se décline en fait en deux volets : le splendide Akasha, son chant féminin, sa construction progressive et son côté orientalisant. Une première partie pose un décor envoûtant, tandis que la seconde clôture en feu d’artifice un album en tous points réussis.
Avec cette musique accessible, divinement écrite et interprétée, Freegh pourrait bien être un des connecteurs qui pourrait (enfin !) ramener le grand public vers l’écoute d’une musique qui parle aux émotions, celle capable de synthétiser l’intelligence des productions des années 70 avec des critères d’accessibilité abordables par le commun des mortels. Pour cela, vous savez ce qu’il vous reste à faire : précipitez-vous sur cet album !