Malheureusement un peu oublié aujourd'hui, la faute à une carrière freinée par l'arrêt successif des deux labels ayant publié ses deux seules offrandes à ce jour (ceci expliquant sans doute aussi un peu cela), Aes Dana est pourtant apparu il y a une dizaine d'années comme un de nos plus valeureux druides aux côtés de Belenos, Bran Barr et Nydvind, véritable tétralogie du (celtic) Pagan Black Metal à la gauloise. Et un des plus anciens puisque que la troupe exalte la furieuse beauté les temps anciens depuis 1994.
Gravé en 2001, La chasse sauvage, évoquera beaucoup de souvenirs chez certains d'entre vous, ceux rattachés au défunt label Sacral Productions (dont le fondateur fut aussi à la tête de la passionnante - et tout aussi oubliée - formation Matutina, dont il faudra bien un jour reconnaître le talent si singulier) et surtout à cet Art noir mêlant avec bruit et fureur instruments traditionnels (bombarde, flute...) et guitares abrasives, accroches celtiques et chants guerriers pour un résultat qui ravive toute la violence d'une époque reculée baignant dans le sang et la magie.
A l'instar de ses frères d'armes, Aes Dana prend soin de ne jamais diluer ses atours les plus abruptes dans des mélodies guillerettes pour festnoz à la mode. Comprendre, La chasse sauvage n'oublie jamais que ses racines s'enfoncent autant dans un lointain passé celte que dans un tertre minéral et grésillant, témoin l'épidermique et pourtant grandiose "Ethereal Visions Part II". Toute la force du groupe réside dans cet alliage ferrugineux équilibré où les influences celtiques se fondent avec finesse sans jamais avoir l'air d'être de maladroites greffes, comme c'est trop souvent le cas. Efficaces et virevoltants, emportés par ces lignes de flute qui font toujours leur petit effet ("Les complaintes de Nemon" par exemple), ces titres sont agressifs, rapides (il suffit d'écouter "Le réveil de Fafnir" pour s'en convaincre), vibrant d'une puissance séculaire qui semble provenir du fond des âges.
Il s'agit aussi d'une œuvre sombre dont les motifs bretonnants n'étouffent jamais l'extrême brutalité, symbole de temps obscurs qui ne se réduisent pas à de simples banquets où l'on danse la gigue en se saoulant à la cervoise, pour au contraire contribuer à lui conférer une sorte de poésie païenne ("Les chemins de Brennos"), chants de guerre autant que chants d'une terre charriant magie et mystère.
Cru et tumultueux et sans aucun polissage incongru malgré ses teintes folkloriques, La chasse sauvage, riche de nombreux morceaux de bravoure ("Anwynn", "La dernière marche"...), peut à juste titre être considéré comme une des pierres essentielles du Pagan Black Metal hexagonal. A (re)découvrir.