"Escape" est le septième album de Journey, sept, un chiffre magique (et pas forcément à cause des 7 nains), qui voit le groupe se séparer de Gregg Rolie, un de ses co-fondateurs, permettant l'arrivée de Jonathan Cain l'inusable homme aux claviers et qui marque également l'entrée de plain-pied des San Franciscains dans cet espèce de Hard FM-AOR/Arena Rock un brin commercialo-Pop qui fera leur succès. Exit donc les touches de Rock Progressif mâtiné parfois de Jazz Rock Fusion qui parsemaient leurs œuvres jusque-là.
Le choix opéré du virage musical fût assez futé puisque "Escape" classa quatre de ses titres dans les charts, l'album en lui-même ayant même fréquenté la première place (!), fût adoubé neuf fois disque de platine et fût nommé meilleur album d'Arena Oriented Rock de tous les temps par les lecteurs de Kerrang en 88. Belle carte de visite s'il en est.
La machine à tubes est née avec cet album. Les quatre hits précités, fleurons de l'opus, ont marqué les fans du style musical à jamais. Les voici: "Don't Stop Believin'" (# 9 dans les charts) est un mémorable hymne hard FM/AOR, du genre à inspirer des générations de groupes naviguant dans cette sphère qui, après un début des plus tranquilles (mon Dieu ces claviers et cette voix !), vous entraine dans un maelstrom de FM mélodique. "Who's Crying Now" (# 4) reprend la même recette en plus AOR. La ballade "Open Arms" (# 2) est quant à elle bien trop courte, mais finalement ce n'est pas plus mal car vous manqueriez de Kleenex. "Still They Ride" (# 19) est une seconde ballade belle à terminer le paquet de mouchoirs précédemment entamé et son solo final, une larme électrique.
Le reste de l'album est partagé entre hit potentiel version mid-tempo ("Stone In Love", son refrain calibré et son solo enjôleur qui n'en finit plus), titres Big Rock ("Lay It Down" et "Escape"), ballade rythmée ("Mother, Father" et ses riffs tranchants où Perry est époustouflant et Schon luminescent), morceau plus punchy ("Keep On Runnin'"), voire Rock basique des origines ("Dead Or Alive").
"Escape", neuf millions d'exemplaire vendus rien qu'aux States, est un album culte supplémentaire qui plaira à tous les inconditionnels de belles mélodies vocales et instrumentales. Rétrospectivement, il fût bien ici question de la naissance d'un monstre tant Journey attira par la suite, dans des stades entiers, des milliers de fans conquis.