"Girls Girls Girls" a permis à Mötley Crüe de truster les ondes radios et TV, tout en assumant à 200% les excès de la Rock’n’Roll way of life de ses 4 membres. Loin de s’arrêter là, les chiffoniers de Los Angeles ont fini par mettre leur vie en danger, Nikki Sixx passant même par un état de mort clinique suite à une overdose. Mais comme la mauvaise graine, le quatuor est toujours vivant et s’adresse à la référence du moment en terme de production : Bob Rock. Ils s’enferment avec ce dernier dans les studios du Little Mountain Sound de Vancouver, et ceci avec un tel professionnalisme que Rock affirmera ne jamais les avoir vu sous l’emprise de drogues ou d’alcool pendant les 3 mois de l’enregistrement. Ceci n’empêche pas Mötley Crüe de nous pondre un nouveau manifeste en l’honneur de la décadence, allant même jusqu’à se mettre en scène tels des aliénés internés dans le livret de l’album.
Gonflés par l’énorme production concoctée par Rock et rendant hommage à chaque instrument, en particulier la basse de Nikki Sixx souvent maltraitée par le mix, les onze titres de ce nouvel opus sont autant de coup de pied au derrière et de shot d’amphétamines. Passée l’inquiétante intro "T’nT (Terror ‘N’ Tinseltown)" avec ses sirènes, ambiances d’hôpital et freinages d’urgence, le moteur est enclenché et le bolide crache ses flammes. Mick Mars claque définitivement le bec de tous ceux qui ne voyaient en lui qu’un piètre guitariste en enchainant les riffs et les soli tranchants. Vince Neil bondit dans tous les sens tel un diablotin, véritable maitre de cérémonie de cette orgie dépravée, et Tommy Lee sait varier l’intensité de son jeu en fonction de chaque titre.
Pour couronner le tout, les invités défilent les uns après les autres pour assurer les chœurs. Jugez plutôt : Jack Blades (Night Ranger, Damn Yankee), Robin Zander et Rick Nielsen (Cheap Trick), Bryan Adams, Steven Tyler (Aerosmith enregistrant son "Pump" dans le studio d’à-côté) et Skid Row au complet viennent tous apporter leur contribution aux titres en cours d’enregistrement. Et il y a de quoi avoir le feu avec un "Dr. Feelgood" au riff gras et implacable tel un dragster lancé à pleine vitesse, ou un "Kickstart My Heart" inspiré par la double dose d’adrénaline reçue par Nikki Sixx pour relancer son cœur arrêté. Imitation d’une moto par Mars en intro, riff qui déblaye tout sur son passage, et solo en talk-box après un break aussi fourbe que calme, rien ne nous est épargné. Heureusement que la ballade "Without You" apporte un pause salvatrice en milieu d’album et que la tension redescend doucement sur le final avec un "Don’t Go Away Mad (Just Go Away)" semi-acoustique et la ballade "Time For Change" au refrain fédérateur.
Impossible de citer tous les titres valant le détour car ce sont tous des perles d’un Hard US à la fois glam et velu, mélangeant énergie et mélodie, puissance et bonne humeur contagieuse. Mötley Crüe n’hésite même pas à sortir la section cuivre ("Rattlesnake Shake"), ou les effets salaces (la braguette de "She Goes Down" !). Le combo californien atteint donc les sommets de son art et nous sert un album incontournable du genre, à sortir de son emballage à chaque fête entre potes ou à chaque baisse de moral !