Bathos, premier essai d’Aarni après un split avec Umbra Nihil déjà bien hermétique deux ans auparavant, en a laissé perplexe plus d’un, une majorité le jugeant sans intérêt ni queue ni tête tandis qu’une petite poignée d’autres (dont votre serviteur fait partie) le tenant pour un chef-d’œuvre méconnu. Le pire était pourtant encore à venir avec ce nouvel album (enfin !).
Si vous comptez parmi les premiers, vous pouvez tout de suite passer votre chemin. Voilà, maintenant, nous sommes entre nous, entre connaisseurs. Entre explorateurs également. Car plus encore que son aîné de quatre ans, Tohcoth est un bric-à-brac dont la clé ne nous est pas fournie. Déjà, ne vous laissez pas rebuter par son visuel, d’une laideur sans nom. Ou plutôt si, tant celui-ci est en fait à l’image du contenu musical dont il est l’écrin. Onze plages pour plus de 70 minutes d’une bande-son bizarre et déglinguée. Ca grouille, ça déborde dans tous les sens pour arriver nulle part. Là des cris de bébé, ici des notes empruntées à Jimi Hendrix ("All Along The Watchtower" justement)… Certains titres sont courts, d’autres beaucoup moins et tout ça cohabite dans un joyeux bordel. Est-ce du doom, genre auquel Aarni est rattaché un peu maladroitement ? Est-ce du rock progressif ? Du rock psychédélique ? Un peu de tout cela sans doute.
C’est surtout un ovni sonore, incompréhensible parfois, tordu, toujours et dont on est pas prêt d’avoir fait le tour. Mais avec ces Finlandais, y-a-t-il vraiment quelque chose à comprendre ? On peut en douter. Aarni n’a jamais été une question de raison mais plutôt une question de foi. On adhère ou pas à un délire que les mauvaises langues – nombreuses – affirmeront qu’il n’est pas du tout contrôlé. Peut-être. Néanmoins, pour peu que l’on est une âme d’aventurier qui n’a pas froid aux oreilles, Tohcoth regorge de bonnes choses, certes bien planquées derrière un empilement d’accords, de riffs, de sons, de vocaux extra-terrestres et trafiqués, d’ambiances ésotériques qui copulent fiévreusement.
Toutefois, on a quand même l’impression que cette fois, Aarni est allé un peu trop loin dans la folie avec ce deuxième album, intéressant et indigeste à la fois, contrairement à un Bathos qui malgré tout semblait plus cohérent et non dénué d’une vraie beauté et d’une forme de mélancolie, ce qui est moins le cas avec son successeur. Reconnaissons au moins à ce groupe une qualité (il n’en est pourtant pas dépourvu) : il ne laissera jamais personne indifférent. Choisissez votre camp !