Même si leur premier album, le bien nommé « Opus Eponymous », est sorti plutôt discrètement en fin d’année 2010, c’est surtout durant l’été des festivals que Ghost s’est forgé un début de réputation grâce à un univers très fort développé sur scène et une musique aux antipodes de l’image, soit un Rock teinté de Pop et très accrocheur, poussiéreux mais intriguant, souvent comparé au Blue Öyster Cult (des textes glauques portés par une voix légère et épaulées de chœurs) et au Queen Of The Stone Age. Formé en 2008 à Stockholm en suède, Ghost se compose de cinq Ghouls anonymes aux instruments et un chanteur (Papa Emeritus) et voue un culte inébranlable à Lucifer tout au long de ses neufs premiers titres. Mais soyons clairs (car l’ambiance ne s’y prêt pas un instant), d’aucun ne cherche à enrôler d’éventuels fans à une autre cause que le Rock.
Après une minute trente passée à la messe du dimanche, une grosse basse lance ‘Con Clavi Con Dio’ gavé d’Hammond grinçant et de rythmique solide. Tout cela fleure bon les Early Seventies psychédéliques et Papa nous accueille en proclamant « Lucifer We Are Here » d’une voix certes bien moins puissante que la moyenne ces canons du genre (sur certains titres on parlerait presque de filet de voix) mais pourtant juste, captivante et envoutante. En y ajoutant l’ambiance psyché du solo, les quelques passages en latin et la solidité du groupe derrière (mais qui sont ces Ghouls plus qu’averties ???), nous obtenons une recette immédiatement payante et fortement accrocheuse. Les trois plus percutantes réjections de l’album vont alors s’enchainer.
Dès l’intro de guitare de ‘Ritual’, l’auditeur se rappelle aux bons souvenirs d’un Blue Öyster Cult en grande forme : mélodie de guitare à pleurer, voix spectrales, texte mystique et ambiance glacée à l’ether. La rythmique, bien lourde sur le riff, rappelle ‘Countdown To Extinction’ de Megadeth et le pont plus lourd évoque Queen Of The Stone Age. Elizabeth Bathory est ensuite mise à l’honneur dans un titre à la hauteur de sa grandiloquence. Souvent chanté en voix de tête, Ghost nous emporte en Transylvanie avec une fois de plus des harmonies et mélodies chiadées et prestigieuses.
La gentille messe noire se poursuit avec la nuit des sorcières sur ‘Stand By Him’ où une fois de plus le fantôme de BÖC s’impose, le groupe allant jusqu’à proposer une accélération centrale du même acabit que sur ‘Cites On Flames’ avant un pont plus lourd et moderne. Ghost, s’appropriant avec brio ce mélange des genres (souvent au sein d’un même titre) maintient vive la flamme de l’originalité et du plaisir à l’écoute. Et une fois encore, ce Ghouls N’ Roll mélodique récolte tous les suffrages ! Bien souvent la première écoute suffit à vous faire fredonner et les suivantes vous rappellent déjà de bons souvenirs.
La suite, sans atteindre de tels sommets (en dehors peut être de ‘Death Knell’ enchainant couplets pesants et refrains enlevés et du splendide final) promet encore de biens bons moments.
Dôté d’un son toujours très organique, aux soli efficaces et à l’ancienne (sans déluge de note mais avec une touche mélodique certaine), Ghost amène également des éléments Doom dans son Rock sur ‘Satan Prayer‘. Puant le souffre à cent lieues à la ronde, ce titre vous souffle de vilaines pensées à la figure et le tordu qui sommeille en vous en redemande, se laissant conduire jusqu’aux buzzantes élucubrations de clavier sur une rythmique presque disco.
Le groupe enfonce le clou avec ‘Death Knell’ et ‘Prime Mover’, et leur musique vous donne parfois cette impression d’avoir des sangsues dans la bouche.
L’apothéose finale est atteinte avec l’instrumental ‘Genesis’ déboulant à la manière d’un générique de fin de film d’horreur de série B. Guitare électrique, melotron et gratte sèche décochent une mélodie qui fera date dans l’histoire du groupe.
Tout au plus pourrions-nous pointer un manque d’audace à proposer des titres plus longs et épiques mais gageons que le second album s’en chargera. En attendant, profitez chers fidèles de ces tonitruants premiers pas sans retenue, et allez en paix !