L’émotion dégagée il y a maintenant plusieurs années de cela par les travaux tutélaires des Isis, Cult Of Luna et autre Russian Circles est loin désormais et ce qu’on a baptisé faute de mieux le post rock, ou metal, peu importe, ne soulève aujourd’hui plus autant d’enthousiasme, lessivé qu’il est par des cohortes de suiveurs cependant que ses fondateurs ont peu à peu confirmé une inspiration en berne à chaque nouvelle publication. Ceci dit, le genre continue de se développer, d’essaimer un peu partout. Nous ne sommes parfois pas à l’abri d’une bonne surprise dès lors qu’un groupe confère une vague originalité sinon un peu de fraicheur à une scène dont on ne peut s’empêcher d’avoir l’impression qu’elle tourne franchement en rond.
Sans être révolutionnaire dans son approche d’un style dont il respecte à lettre le moindre des invariants (sustain de guitares stratosphériques, longues échappées en forme de montée en puissance, rythmique plombée…) qu’il aligne sagement comme des pinces à linge sur un fil, Sleepmakeswaves est plutôt une bonne nouvelle en cela que ces Australiens démontrent que le Post Metal instrumental ne se conjugue pas toujours avec ennui absolu. Il ne leur faut pourtant parfois pas grand chose pour en apporter la preuve ; ici des lignes de violon (lors des dernières mesures de "To You They Are Birds, To Me They Are Voices In the Forest"), là des notes de claviers paisibles ("In Limbs And Joints"), quelques touches Trip/hop saupoudrées ailleurs ("Now We Rise And We Everywhere").
De ce premier essai longue durée, coule une force tranquille, une mélancolie doucereuse qui permet à ces huit compositions dont seules trois d’entre elles prennent réellement leur temps, de ne jamais ennuyer. Epicentre de …And So We Destroyed Everything, "A Gaze Blanks And Pitiless As The Sun", du haut de ses plus de dix minutes, synthétise assez bien la manière dont Sleepmakeswaves réussit, à sa mesure modeste, à aérer le genre en lui greffant un chapelet d’éléments, de détails qui procèdent par petites touches pointillistes, à l’image de ces cuivres discrets mais déterminants. Epousant un tracé plus éprouvé, le terminal titre éponyme séduit néanmoins par sa vibration de six-cordes entêtante, colonne vertébrale atmosphérique autour de laquelle le groupe tricote une trame tour à tour evanescente ou plus accrocheuse qui se délite, s’efface en une brise insaisissable. C'est beau.
En définitive, Sleepmakeswaves signe un galop d’essai au souffle délicat, confirmant en cela les promesses que leur Ep In Today Already Walks Tomorrow annonçait. Entendons-nous bien, le groupe n'invente (presque) rien mais outre le fait qu'il injecte de discrètes touches personnelles à son Post Metal, il s'écoute avec un vrai plaisir...