Presque deux ans après son coup de maître initial, le duo que forme Vulgar Unicorn revient avec ce disque à la pochette plus que spéciale, livré dans un boitier largement basé sur du plastique rose (un peu le penchant progressif du "Very" des Pet Shop Boys mais là s’arrête la comparaison). En effet, c’est toujours sur une base de longs développements que se concentrent une fois de plus les délires de nos Anglais. Pour cette galette, le couple s’est fait aider de plus d’une dizaine d’intervenants qu’il serait trop long de lister ici mais qui apporte chacun une touche bienvenue.
Les quatre compositions qui forment cet opus sont elles-mêmes divisées en 4 parties pour un ensemble de seize sous-ensembles ne dépassant que très rarement les six minutes (seules 3 vont au delà). De cet angle de vue il n’y a pas grand changement comparé à "Under The Umbrella". Cependant, le contenu gravé sur la galette en est tout autre et risque de surprendre violemment l’auditeur qui s’était délecté de la livraison précédente et qui s’attendait à un bis-répétita assuré.
Le propos s’est considérablement musclé et modernisé (énormément de loops, de samples ainsi que des bruitages), les influences jazzy sont dorénavant majoritaires et le progressif soyeux et touffu s’est transformé en musique complexe, mais jouissive si elle est maîtrisée au fur et à mesure des écoutes. Beaucoup d’instruments à vent de tous les styles(trompette, hautbois, saxophones…), sur des rythmes souvent en contre temps, une sorte d’expérimentation permanente que les guitares viennent entacher ici et là (un résumé de la suite "The Stitch").
Très peu de titres comportent des vocaux (cinq en tout et pour tout, dont la partie 3 de "Sieving The Day’s Events") et l’ensemble finalement fait honneur à ce mixte de modernité et de classicisme. Alors, vu de la fenêtre de l’amateur de musiques progressives, la déception pourrait être grande, mais il y a cette qualité de compositions de Soord et Randall qui permet de donner une accessibilité surprenante à ce monument. Sur la longueur, l’écoute peut être difficile et personne ne viendra blâmer l’auditeur d’opter pour une écoute par chapitres. Ce n’est qu’au bout d’un nombre certain d’écoutes que la bête sera domptée avec, par exemple, l’opposition des deux premières parties de "Unnatural Animation" : électronique et tranquille pour la première, plus rentre-dedans pour la seconde, avant un passage planant en guise de break.
Vulgar Unicorn a fait de ce "Sleep With The Fishes" un nouvel eldorado du progressif avec une bonne dizaine d’années d’avance sur les poursuivants. Si, de première approche, cet opus peut sembler inaccessible, il saura vous faire découvrir lentement mais sûrement l’étalage de talent pur qu’était le couple Soord/Randall, pour un voyage unique et époustouflant.