Déjà auteur d’une méthode de guitare, dispensant ses activités pédagogiques afférentes un peu partout en Basse Normandie, s’il en est un dans l’Hexagone qui met toute son énergie au service de sa passion du manche électrique, c’est bien notre compatriote Thomas Bressel : sous la casquette du compositeur cette fois, troisième album en 5 ans, la mobilisation occasionnelle de quelques pointures en la matière (Christophe Godin, entre autres), et l’usage d’une épique Vigier 7 cordes qu’il brandit et manie telle une épée d’Excalibur, le rapprochement prenant ici tout son sens.
Résultat, de A à Z, les assauts d’un Métal-rock endiablé et doublé des riffs acérés du Guitar Hero aguerri n’ont de cesse d’imposer leurs commandements. On peut évoquer la logique de l'exutoire - mais bien orchestré. Vous voilà prévenus, galop rythmique et puissante verve épico-ténébreuse sont à l’honneur, dans ce bal affectionné par un genre où la guitare s’empare des vocalises. Nul besoin d’une narration oratoire en ces territoires là de manière générale, et en ceux de Thomas en particulier.
Oui, ce nouveau projet est une réelle déferlante de fringantes cordes électriques, mais attention, entendons-nous bien, celle-ci n’a rien à voir avec une charge de hordes instrumentales et barbares en rangs désordonnés : premier constat, la sonorité est impeccable, réellement digne des meilleures productions afférentes. Secondo, et sans cela le professionnalisme technique serait un peu vain, l’artiste soigne le spectacle : "Virtual Tragedies" est globalement caverneux et oppressant, voire funeste par moments, mais sa méthode est protéiforme. L’album évite l’écueil d’une lassitude en embuscade, pour peu que l’auditeur y prête autre chose qu’une oreille vagabonde.
Ainsi, le visage de ce Rock sous haute tension s’avère changeant dès la première plage. Les riffs musclés de 'Invisible Breath' vont soudain s’allonger sous nos pas, se répandre en nappes chromées et agonisantes, tel un ruissellement guidant le quidam vers l’entre-deux-mondes d’un Rock sauvagement électrisé et des limbes d’une spiritualité opprimée. La suite des 'Virus' étale toute sa véhémence, avant l’entame de sa troisième partie, porteuse de l’angoissant cheminement d’une guitare rampante et suintant un mal insidieux. Le presque éponyme se permet quant à lui de marier une prestation généreusement métallisée avec un moment de bravoure atmosphérique, porté par l’emphase de la 7 cordes exhalant son phrasé tragiquement prédicateur; cet élan est prolongé par 'Louder Than Words', sur une même tonalité de fin des temps, et sera conclu par 'The Never-Ending Cycle Of Life', le titre final, via le flambeau d’une logique similaire.
Pour Thomas, il n’y a pas d’antinomie entre rêverie torturée et déflagrations tonitruantes, il s’agit bien de transes en corollaires, dont les ferments d’inspiration se sont nourris les uns des autres.
Pour récompenser un tel voyage, un petit 6,5/10, sensiblement frileux ? Sans doute parce que la démarche technique prend parfois le pas sur l’expressivité émotionnelle. Le jeu de batterie extrêmement précis de Charlie Ledoyen est un partenaire précieux, mais il est dommage que le ronronnement d’une basse ne vienne soutenir la partition à minima; et la prestation réalisée par Thomas est tellement sidérante qu’elle en focalise presque trop la mécanique primaire du cortex auditif, inhibant ici et là cette libération d’adrénaline qui devrait logiquement en découler. Quoi qu'il en soit, les amateurs de Shred ne seront pas déçus. Pour cela, c’est du béton, garantie MW !